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Mondial 2022-Maroc-El Haddaoui : "Je m'attends à un match serré contre la France"

En 1986, le Maroc avait atteint les 8e de finale de la Coupe du Monde face à la RFA (-). Mustapha El Haddaoui, qui était de l'aventure, n'en veut évidemment pas à la génération 2022 d'avoir fait beaucoup mieux, en se qualifiant pour les demi-finales de la Coupe du Monde au Qatar. Avant le match face à la France, mercredi, l'ancien milieu de terrain des Lions de l'Atlas, également passé par l'Hexagone (Saint-Etienne, Nice, Lens, Angers) ne s'interdit pas de rêver à une finale.
De notre correspondant en France,

Mustapha El Haddaoui.
Mustapha El Haddaoui

Sport News Africa : Se qualifier pour les demi-finales de la Coupe du monde, est-ce vraiment un exploit pour cette sélection marocaine ?

Mustapha El Haddaoui : C'en est un dans la mesure où personne ne s'attendait à ce qu'elle atteigne ce stade. On lui promettait plutôt une élimination dès le premier tour. C'était quelque part assez logique, puisque le Marioc avait comme adversaire la Croatie et la Belgique, qui faisaient partie des outsiders. En demi-finales, on s'attend plus à voir la France, le Brésil, l'Allemagne, l'Espagne ou l'Argentine plutôt que le Maroc. Mais c'est moins une surprise si on regarde de près le parcours des Lions : ils ont terminé à la première place de leur groupe après avoir battu la Belgique (2-0) et fait match nul en ouverture contre les Croates (0-0), ils ont élimné l'Espagne (0-0, 3-0 aux t.a.b) en 8e, et ils n'ont encaissé qu'un seul but, contre le Canada (2-1), et encore parce que Nayef Aguerd a marqué contre son camp. Si le Maroc est en demi-finale, ce n'est pas un hasard, et c'est mérité. Mais c'est évidemment une performance historique pour le Maroc, l'Afrique et le monde arabe.

El Haddaoui sous le maillot du Maroc, face à la RFA, au Mondial 1986.

Une chose est certaine, Didier Deschamps et ses joueurs ne vont pas prendre leur adversaire à la légère...

Didier Deschamps est un grand sélectionneur, un grand compétiteur, et il sait parfaitement que le Maroc n'est pas là par chance. Les Français vont nous respecter, nous allons respecter les Français. Bien sûr, le favori, c'est la France. C'est le champion du monde en titre, une des meilleures époques du monde, elle a des joueurs de très haut niveau. On peut dire qu'il y aura plus de pression sur elle que sur le Maroc. Mais vous savez, quand on est en demi-finale d'un Mondial, on veut aller au bout. Les quatre demi-finalistes y pensent tous. Ok, le Maroc a réussi sa Coupe du Monde, même s'il est éliminé par les Bleus. Mais on a envie de rêver. Sans rêves, il n'y a pas d'ambitions. Je m'attends à un match serré. Je suis marocain, je suis optimiste, j'y crois bien sûr, même si j'ai beaucoup d'estime pour la France, un pays où j'ai joué plusieurs années. Mercredi, je serai supporter des Lions. Et si la France se qualifie pour la finale, je serai derrière elle !

Justement, que pensez-vous de cette Equipe de France ?

C'est une très belle équipe. Elle a des joueurs fantastiques, dont Kylian Mbappé, bien sûr, mais il n'est pas le seul. Prenez Olivier Giroud : il aurait pu ne pas être là, il ne faisait pas l'unanimité en France, et pourtant, il est décisif dans le parcours des Bleus. Mentalement, il est très fort. Antoine Griezmann, également, est très important, dans son rôle de passeur.  Et cette équipe est très forte mentalement. Elle a réussi à battre le Danemark (2-1), au premier tour, un adversaire qui ne lui réussissait pas beaucoup depuis des années. Contre l'Angleterre, elle prend l'avantage alors qu'elle souffrait. Cette équipe joue bien, elle a envie d'aller au bout, elle a aussi sa part de chance, comme toutes les équipes. Mais le Maroc ne doit pas avoir peur. Il doit respecter les Bleus, mais adopter la même attitude que face aux grandes sélections qu'il a pu affronter jusqu'à maintenant.

"Regragui a su créer une atmosphère"

Il y a tout de même deux interrogations : la première concerne la santé de certains joueurs...

Oui. C'est effectivement un problème. Contre le Portugal (1-0), Aguerd et Mazraoui n'étaient pas là. Cela n'a pas empêché la défense, en partie remaniée, de bien tenir. On ne sait pas où ils en sont avant cette demi-finale. Et Saïss, le capitaine, est sorti sur blessure. Visiblement, il jouera. Évidemment, quand des joueurs importants sont blessés, qu'on ne sait pas si le sélectionneur pourra compter sur eux pour ce match, c'est ennuyeux. Mais vous avez vus que les remplaçants ont su se mettre au niveau. Il y a un état d'esprit qui se dégage, une formidable solidarité. Et cela peut renverser des montagnes. Bien sûr, on préfèrerait que tous les titulaires soient là, mais si ce n'est pas le cas, Walid Regragui saura trouver une solution.

La seconde, c'est la réaction du Maroc s'il est mené au score, ce qui ne lui est jamais arrivé depuis le début de la Coupe du Monde...

C'est vrai. Il serait intéressant de voir sa réaction. Mais là aussi, je ne suis pas inquiet. On dit que l'équipe défend très bien, ce qui est vrai, même si elle concède des occasions. Pourtant, je ne suis pas d'accord quand j'entends dire ou que je lis que le Maroc est une équipe qui ne fait que défendre. C'est faux ! Elle est également capable de produire des choses intéressantes dans le jeu, car elle a des joueurs qui ont un vrai profil technique, comme Boufal et Ziyech. Le Maroc n'a pas l'effectif des meilleures équipes du monde, il joue avec ses valeurs, ses qualités. On défend bien, on sait jouer au football, on fait preuve d'efficacité. Pour en revenir à Ziyech, non seulement il tient son rôle offensif, en marquant, en faisant marquer, en cherchant toujours à déstabiliser les défenses adverses, mais on le voit également fournir un vrai travail défensif, en taclant. C'est la preuve qu'il est heureux, qu'il se sent bien. Et qu'on ne pouvait pas se passer de lui pour un tel tournoi.

Walid Regragui a été nommé au mois d'août pouyr remplacer Vahid Halilhodzic. Il n'a eu que troiis matches amicaux et quelques jours de stage, en septembre et en novembre, pour préparer cette Coupe du Monde. Comment expliquez-vous cette réussite immédiate ?

D'abord, au Maroc, beaucoup de gens voulaient que ce soit lui qui entraîne la sélection. La fédération l'a nommé en lui disant qu'elle lui faisait confiance, que la Coupe du Monde n'était pas l'objectif prioritaire. A partir de là, Walid a pu travailler sereinement. Sans trop de pression, même si, dans un pays de football comme le Maroc, il y en a... Très rapidement, il a su créer une atmosphère, un état d'esprit. Cela s'était vu lors des matches amicaux en Espagne au mois de septembre face au Chili (2-0) et au Paraguay (0-0). L'équipe avait produit un jeu offensif, les joueurs semblaient heureux d'être là. Et on l'avait de nouveau vu en novembre contre la Géorgie (3-0). Walid Regragui, même si c'est sa première expérience de sélectionneur, a quand même de l'expérience. Tactiquement, il sait très bien où il va, en faisant jouer son équipe en fonction des qualités de son effectif. Il est humble, intelligent, sa communication, que ce soit avec les joueurs ou la presse, fonctionne bien. Il a aussi su bien s'entourer, en ayant constitué le staff technique qu'il voulait. Et puis, on aura un petit avantage sur les Français, c'est le public. Il ne faut pas négliger cela, car les supporters marocains seront vraiment à fond derrière leur équipe, ils mettent une ambiance extraordinaire. Avec eux, le Maroc joue presque à douze...

Alexis BILLEBAULT

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