
Un parcours exemplaire, une fin brusque
Kamou Malo, 62 ans, n’était pas un inconnu. Policier de formation, capitaine de son état, il avait déjà brillé en club : titres de champion avec Rail Club Kadiogo (2016-2017) et AS Sonabel, sans oublier une Coupe du Burkina Faso. À la tête des Étalons, il impose un 4-4-2 solide, alliant jeunesse et expérience. Résultat ? Une qualification impeccable pour la CAN 2021, puis un parcours inoubliable au Cameroun : victoire aux tirs au but contre les Panthères du Gabon en huitièmes, 1-0 contre la Tunisie en quarts, avant une défaite 0-3 face au Sénégal en demi-finale. Pour la petite finale, un 3-3 contre le Cameroun, perdu aux tirs au but (3-5). Quatrième place, la meilleure depuis 2017.
Mais la Fédération burkinabè de football (FBF), sous la présidence de Lazare Banssé (élu en 2020), tranche dans le vif, le 12 février 2022 : «Les contrats des quatre techniciens Kamou Malo et son staff : Firmin Sanou, Alain Nana, Saïdou Brama Traoré ne seront pas renouvelés.»
Kamou Malo détaille les circonstances autour de son limogeage
C'est dans une ambiance à la fois pesante et émotive que Kamou Malo, ancien coach des Étalons, est revenu sur son éviction de la sélection burkinabè. L'homme au tempérament posé et direct a mis en lumière les dessous d'une séparation hâtive, imputable à des facteurs non sportifs et à l'émoi collectif. Dans un entretien sincère à Pixel Live Studio, Kamou Malo s'est penché sur le match souvent considéré comme celui qui a scellé son destin.
« Comme le match a viré au cauchemar, certains en ont profité »
« C’est ce match-là (Match pour la 3ème place face au Cameroun) que les gens ont pris pour en faire un prétexte. On te dit, on t'attend ici mais tu passes ça », déclare-t-il, précisant qu’il avait déjà été confronté à de multiples tentatives visant à affaiblir son rôle. « Tout ce qui avait été organisé comme cabale, j’ai eu la chance de pouvoir contourner ces obstacles. Mais cette fois, le contexte émotionnel a joué contre moi. »
Kamou Malo assure ne pas s’être attendu à une telle issue après la CAN. « Pour moi, si je revenais avec une médaille, il serait difficile qu’on ne me reconduise pas. Mais comme le match a viré au cauchemar, certains en ont profité. Le Burkina Faso est très émotif. On s’est appuyé sur cette émotion négative pour sceller mon sort », confie-t-il, avant de détailler l’épisode qui a précipité sa sortie. Trois jours plus tard, le directeur de cabinet du ministère des Sports, M. Sori, l’appelle pour lui demander de se présenter à la Fédération.
Portables interdits pour une réunion
« On est arrivé, trois jours après, le DIR CAB, M. Sori, m'appelle pour me dire, mais écoute, tu n'as pas vu les appels ? Je lui ai dit, mais quels appels ? Le président tentait de te joindre, mais tu es attendu demain matin à la fédération. Avec un ton... Quand je suis arrivé à la Fédération, je suis arrivé trouver mon staff technique. Normalement, c'est moi qui devrais convoquer ou informer mon staff. J'ai été reçu par le DIR CAB et le président lui-même. Alors ce qui m'a tiqué c'est qu'on récupère mes portables à l'entrée. Je dis mais c'est quelle histoire ça ? Bon, je suis rentré, je suis allé assis, mot pour mot le président Lazare Bansé me dit : Coach, écoute, en tout cas tu as fait une belle CAN. Le boulot, il est bien, vous avez bien travaillé, vous avez largement dépassé les objectifs. Mais j'ai d'autres ambitions pour le football burkinabé. Ce qui est normal. Et j'étais en fin de contrat. Je dis : "Président, merci de me féliciter. Et j'étais là assis ". Le DIR CAB me dit : Mais écoute, ça veut dire qu'on ne va pas te renouveler. J'ai dit : Mais oui, j'ai compris. Tu veux que je me mette à genoux pour te demander pardon ou quoi ? Je ne comprends pas. Je me suis levé avec mon bidon d'eau comme d'habitude et je suis parti.»
Ce qui a vraiment heurté Kamou Malo, ce n’est pas le refus de prolonger son contrat, mais l’orchestration de cette annonce. « Ce qui m’a fait mal, c’est que, à peine j’ai quitté la Fédération, avant d'arriver à la maison chez moi, les réseaux sociaux étaient déjà inondés de la nouvelle. »
Le sentiment du devoir accompli
Malgré quelques regrets, l’ex-sélectionneur des Étalons du Burkina Faso, Kamou Malo, choisit aujourd’hui de se focaliser sur les aspects positifs : « J’ai servi mon pays avec honneur. Le football burkinabè a de l’avenir, et si ma modeste contribution a permis de le faire grandir, alors je pars en paix. Mais mon seul regret c'est de n'avoir pas eu une médaille pour couronner ce parcours. »
Jusqu'à présent, Kamou Malo, seul entraîneur local qui a amené les Étalons en demi-finale d'une Coupe d'Afrique des Nations (CAN), reste un incompris.
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À propos de l'auteur
Ablam GNAMESSO
Rédacteur sportif
Reporter sportif et journaliste tout terrain. Membre AIPS et jury des IFFHS Awards.
