
Le 8 mai 2025, Rugby Afrique sonnait l’alarme. Dans une correspondance adressée au ministre camerounais des Sports Narcisse Mouelle Kombi, Herbert Mensah, président de l’instance continentale, prévenait : « Si aucune mesure corrective n’est engagée d’ici fin juin, la Fédération camerounaise de rugby sera suspendue ».
L’avertissement était clair, l’ultimatum ferme. Mais à Yaoundé, rien n’a bougé. Aucune dissolution du bureau, aucun Comité provisoire. A la place, un silence gêné, doublé d’une défense ferme du ministre en faveur d’un processus électoral « controversé ».
L’étau se resserre
Pourtant, le 2 septembre dernier, Herbert Mensah a repris sa plume. Cette fois, son ton est encore plus tranchant : il dénonce « un blocage institutionnel durable et une dualité de structures concurrentes ; des violations réitérées des textes applicables ; l'exclusion arbitraire de clubs et académies dûment affiliés ; l'absence de transparence et de légalité dans la conduite des processus électoraux ». Rugby Afrique donne trente jours à la Fécarugby pour convoquer une nouvelle Assemblée générale élective, sous sa supervision directe. À défaut, la suspension du Cameroun sera automatique.
Un président soutenu… mais isolé
Derrière les échanges épistolaires, la fédération vit une véritable guerre intestine. Élu le 28 décembre 2024 lors d’une assemblée générale critiquée, Me Patrice Monthé est désormais contesté de toutes parts. En façade, il bénéficierait d’un soutien du ministre Mouelle Kombi, qui, dans une réponse à Rugby Afrique en mai, juge les élections « conformes » et refuse l’option d’un Comité provisoire de gestion, déjà testée sans succès par le passé. Mais en interne, les accusations fusent : inertie volontaire, gestion opaque, décisions unilatérales, instrumentalisation de la justice pour neutraliser ses opposants.
La fronde des deux tiers
Le 5 juillet 2025 en effet, le couperet tombe : deux tiers du bureau exécutif signent un document au vitriol dénonçant un président qui « entretient une inertie persistante », « ignore systématiquement les réunions statutaires » et bloque le fonctionnement normal de la fédération.
Le texte accuse Monthé d’avoir saisi les tribunaux pour empêcher la relance des activités, avec l’appui de réseaux extérieurs à la fédération. « Ces manœuvres judiciaires visent à gagner du temps, à neutraliser toute tentative de redressement et à renforcer un statu quo nuisible à la discipline », écrivent les frondeurs, qui réclament l’intervention urgente du ministère pour mettre fin à ce blocage.
Le paradoxe est là : si Rugby Afrique reproche à l’État camerounais son laxisme dans la supervision, beaucoup estiment qu’au contraire, la tutelle joue un rôle trop actif… mais en faveur du statu quo. Plusieurs sources internes accusent le ministre des Sports de protéger le président Monthé, malgré les dissensions internes et la pression extérieure. Un double langage qui entretient la paralysie.
Le spectre de la suspension
Derrière cette bataille de gouvernance, les joueurs et clubs camerounais payent le prix fort. Depuis des mois, plus de championnats réguliers, pas de Coupe du Cameroun, des tournois reportés sine die. Et à présent, la menace d’exclusion plane : si la Fécarugby ne se conforme pas aux exigences de Rugby Afrique, elle sera radiée des compétitions continentales et mondiales. Une sanction qui sonnerait comme un coup d’arrêt brutal pour une discipline encore fragile, mais riche d’un vivier de talents.
Rejoignez notre communauté sportive !
Suivez-nous sur les réseaux sociaux pour ne rien manquer de l'actualité sportive en temps réel.
À propos de l'auteur
Arthur WANDJI
Rédacteur sportif
Correspondant SNA au Cameroun et Gabon. Spécialiste des Lions Indomptables.
