
Comment te présenterais-tu aujourd’hui, en tant que joueur professionnel d’esport ?
Je m’appelle Mouhamed Thiam, mais on me connaît sous le pseudo DexxJunior. J’ai 22 ans et je suis joueur professionnel d’EAFC, anciennement FIFA.
Comment es-tu tombé dans le monde de FIFA ? Tu te souviens de ton tout premier tournoi ?
C’est grâce à mon frère, Addexx, qui a lui-même été joueur professionnel. Je me rappelle parfaitement de mon tout premier tournoi : j’avais 14 ans, c’était le tournoi Mr Robot, et j’avais réussi à le gagner. Ce jour-là, j’ai compris que je pouvais aller loin.
Quel a été le vrai tournant dans ta carrière ?
Ma victoire au FEJA, mon tout premier tournoi continental. Je n’étais pas favori, et même moi j’ai été surpris par mon parcours. Ce fut un déclic.
Tu as remporté le GamrX 2023 au Nigeria et été élu MVP de l’eBotola 2025. Que représentent ces deux distinctions ?
L’eBotola a été une compétition très relevée. Être MVP, c’est la reconnaissance de mon niveau, mais la défaite en finale reste l’un de mes pires souvenirs. J’espère vraiment avoir une nouvelle chance de remporter ce tournoi.
Le GamrX, c’était plus qu’un défi sportif : beaucoup pensaient qu’un étranger ne pouvait pas gagner un tournoi FIFA au Nigeria. J’ai voulu prouver le contraire. Et je l’ai fait.

Comment te prépares-tu avant un grand tournoi ?
Je travaille étroitement avec mon coach, Sapinsucrerie. On analyse nos adversaires la veille du tournoi, on décortique leur style. Niveau mental, je gère bien la pression. Je dors tôt, je mange bien, et je prépare toujours une playlist musicale pour rester concentré.
Tu affrontes des joueurs du monde entier. Où situes-tu ton niveau actuellement ?
Je pense pouvoir intégrer le Top 30 mondial, mais pour ça, il me faut plus d’opportunités. Le potentiel est là, il faut juste les moyens de progresser davantage.
As-tu été approché par des clubs ou des marques internationales ?
Oui, mais rarement. Beaucoup de structures hésitent à investir dans un joueur basé au Sénégal. Elles estiment que les conditions locales ne sont pas encore favorables.
Une scène sénégalaise pleine de potentiel, mais sous-exploitée
Comment vois-tu la scène esportive au Sénégal aujourd’hui ?
Il y a énormément de potentiel. On a des joueurs de très haut niveau. Mais la scène est mal gérée. On accuse un gros retard par rapport à d’autres pays africains.
Quelles sont les principales difficultés rencontrées au Sénégal au quotidien par les joueurs ?
Le manque de sponsors, d’opportunités, de visibilité, mais aussi des problèmes techniques comme les serveurs ou l’accès à une bonne connexion. C’est un vrai frein à la performance.
Tu appelles à la création d’une fédération esportive. Peux-tu nous en dire plus ?
Il y a bien une « fédération » aujourd’hui, mais elle ne nous représente pas. Elle agit comme une structure privée, totalement déconnectée des joueurs et de la communauté. Et le modèle des fédérations sportives classiques ne convient pas à l’esport.
Chaque éditeur a ses propres circuits et ses règles. Ce qu’il faut, c’est une entité flexible, dynamique, en phase avec les réalités du secteur. Et surtout, qu’on ait une voix unifiée à l’échelle africaine, car les problèmes sont les mêmes partout : manque de soutien, d’investissement, d’infrastructures.
As-tu tenté de porter ce combat auprès des institutions ?
Malheureusement, non. Je n’ai encore jamais eu l’occasion de discuter avec le ministère des Sports ou le CNOSS. J’aimerais que les portes s’ouvrent.
Y a-t-il des modèles qui t’inspirent en Afrique ?
Oui, le Maroc. Ils ont mis en place une fédération sérieuse, avec des investissements, des championnats structurés. C’est un exemple à suivre.

Construire l’avenir du gaming africain
Penses-tu que l’esport peut devenir un secteur professionnel en Afrique ?
Absolument. C’est déjà le cas ailleurs dans le monde. L’esport est un secteur économique en pleine croissance, qui génère des revenus importants. Il suffit d’y croire, d’investir et de structurer.
As-tu envie de transmettre, de former ?
Oui, je rêve de créer ma propre structure ou académie. J’aimerais accompagner les jeunes gamers sénégalais, les aider à se professionnaliser et, pourquoi pas, former de futurs champions.
Quel message adresserais-tu à un jeune Sénégalais passionné de FIFA ?
Ne lâche rien. Entraîne-toi. Crois en tes rêves. Accepte la défaite, apprends d’elle. Et surtout, bats-toi. Parce que l’esport, c’est le futur.
