Le Meilleur Joueur du Monde, une alternative objective au Ballon d’Or

Comment est née la plateforme Le Meilleur Joueur du Monde ?

L’idée remonte à 2015, lorsque j’étais encore étudiant en journalisme. J’avais publié un article sur mon blog intitulé « Ballon d’Or : des critères à réformer ». Chaque année, le même constat revenait : des injustices dans l’attribution des trophées individuels. En 2022, au moment où le débat faisait rage entre Sadio Mané et Karim Benzema pour le Ballon d’Or, j’ai décidé de concrétiser ce projet. Depuis, chaque semaine nous notons les performances des joueurs dans les cinq grands championnats européens. Chaque mois, un classement actualisé est publié, sans attendre la fin de la saison.

Qu’est-ce qui vous a poussé à créer une alternative aux prix existants comme le Ballon d’Or ?

L’injustice dans les récompenses individuelles. Historiquement, plus de 90 % des Ballons d’Or ont été attribués à des joueurs offensifs. Pourtant, le football ne se résume pas à marquer des buts : défendre et empêcher l’adversaire de marquer est tout aussi essentiel. Nous avons donc conçu une méthode de proportionnalité : par exemple, un certain nombre d’arrêts d’un gardien ou de duels gagnés par un milieu peut être équivalent à un but marqué par un attaquant. Cela permet de comparer objectivement tous les postes et de valoriser ceux qui, jusque-là, étaient sous-estimés.

Avez-vous rencontré des obstacles particuliers au lancement ?

Oui, plusieurs. Le premier a été financier. Il faut une équipe, et je ne pouvais pas demander à des gens de travailler gratuitement. J’ai dû recomposer l’équipe avec des collaborateurs motivés, prêts à porter le projet sans grandes prétentions salariales au départ.

Ensuite, il y a eu la question de la crédibilité. Beaucoup doutaient de nous, surtout lors de la première année. En 2022, Sadio Mané était en lice pour le Ballon d’Or, mais dans notre classement il n’était que 4e. Au Sénégal, certains nous sont tombés dessus. Mais cela a prouvé notre indépendance : nous ne privilégions pas un joueur pour sa nationalité, sa réputation ou son aura médiatique. Seules ses performances comptent.

Concrètement, comment fonctionne votre système de notation ?

Chaque joueur reçoit des points après ses matchs. Mais comme on ne peut pas noter un attaquant comme un défenseur, nous avons établi un système de proportionnalité. Tout part du but : combien de duels gagnés par un milieu, combien d’arrêts par un gardien, combien d’interceptions par un défenseur équivalent à un but ? Nous avons analysé des centaines de matchs pour établir ces barèmes. À la fin de la saison, nous additionnons les performances individuelles et les points collectifs liés aux trophées remportés. Le joueur qui totalise le plus de points devient Le Meilleur Joueur du Monde.

Qui note les joueurs et sur quelles bases ?

Les notations sont faites à partir de critères statistiques et objectifs. Mais il ne s’agit pas seulement de chiffres bruts. Par exemple, dix duels gagnés sur dix valent plus que dix duels gagnés sur trente. De même, un arrêt sur une frappe anodine n’a pas la même valeur qu’un arrêt décisif sur un penalty. Nous cherchons donc à combiner évaluation quantitative et qualitative.

Comment garantissez-vous l’objectivité et l’indépendance ?

Notre système est impersonnel. Le nom du joueur n’a aucune importance, seules ses performances comptent. Nous ne subissons aucune pression. L’exemple de Sadio Mané en 2022 est parlant. Malgré l’attente au Sénégal, nous ne l’avons pas placé sur le podium parce que les chiffres ne le justifiaient pas. Contrairement au Ballon d’Or, il n’y a ni lobbying ni marketing qui entrent en jeu dans notre classement.

Y a-t-il une place pour les experts ou les supporters dans votre système ?

Pas pour l’instant. Les supporters peuvent réagir et commenter, mais leurs votes ne sont pas intégrés. En revanche, nous réfléchissons à intégrer un panel d’experts pour qualifier certaines actions. Car les statistiques seules ne suffisent pas toujours. Une interception décisive qui sauve un but ne peut pas être notée de la même façon qu’un simple ballon dégagé. C’est une marge de progression que nous souhaitons développer pour Le Meilleur Joueur Du Monde.

Le Ballon d’Or est souvent critiqué pour sa subjectivité. En quoi votre concept corrige-t-il cela ?

Le Ballon d’Or repose sur des votes. Or, un votant peut être influencé par un seul match marquant ou par le lobbying d’un club. Ce manque de lisibilité alimente la subjectivité. Notre méthode, basée uniquement sur des données quantitatives et qualitatives, offre une lecture claire et vérifiable. Elle ne laisse pas place aux sensibilités personnelles.

Votre méthode pourrait-elle inspirer des instances comme France Football, la FIFA ou la CAF ?

Absolument. L’UEFA a déjà expérimenté en 2023 une zone de notation statistique (FedEx Performance Zone). Cela prouve que les données sont l’avenir. En NBA, le MVP est désigné en grande partie grâce aux statistiques. Nous pensons que le football doit suivre ce chemin. Notre ambition est que les fédérations, les clubs, les confédérations et pourquoi pas la FIFA puissent s’inspirer de notre méthode pour leurs distinctions.

Le 20 septembre à Dakar, vous dévoilerez le Top 50 mondial. Quel message voulez-vous faire passer ?

C’est la première fois que nous organiserons une cérémonie publique, avec médias et acteurs du football. Les éditions précédentes étaient uniquement en ligne. Nous voulons prouver qu’en Afrique, il est possible de créer des projets innovants et crédibles. Le message central, c’est l’objectivité : chaque place sera justifiée par des données vérifiables. Seule subjectivité possible : la sensibilité des supporters, mais le classement lui, sera factuel.

Avez-vous des ambitions de partenariats avec des clubs ou des fédérations ?

Oui. En Afrique, les données sont encore trop peu exploitées. Beaucoup de joueurs qui ont marqué l’histoire de leur sélection deviennent anonymes faute d’archives statistiques. Nous voulons collaborer avec les fédérations pour identifier chaque saison leurs meilleurs éléments. Les clubs, les ligues, les diffuseurs ou encore les confédérations sont également des partenaires potentiels. Nous avons déjà entamé des démarches, et des collaborations devraient bientôt être annoncées.

Pensez-vous que votre classement puisse un jour rivaliser avec le Ballon d’Or ?

C’est notre ambition. Nous voulons d’abord nous implanter au Sénégal, puis dans la sous-région, en Afrique et à terme à l’échelle mondiale. Nos critères sont universels : un joueur népalais ou uruguayen peut être évalué de la même manière. Le 20 septembre à Dakar est une étape, mais l’objectif est de devenir une référence internationale.

Quel regard portez-vous aujourd’hui sur le Ballon d’Or ?

Cela reste le trophée le plus prestigieux du football et il faut saluer le fait qu’il soit attribué par des journalistes. Mais il souffre d’un manque de clarté et de cohérence dans ses critères. En 2010, Messi avait été sacré alors que Sneijder, Iniesta ou Xavi avaient une saison plus complète. Plus récemment, Messi a remporté le Ballon d’Or 2023 grâce à sa Coupe du monde, alors qu’Haaland avait été plus régulier sur toute la saison. Ces exemples illustrent la subjectivité qui entache sa crédibilité.

Si vous deviez formuler un vœu pour Le Meilleur Joueur du Monde dans 10 ans ?

Que Dakar devienne une place forte mondiale des statistiques dans le football. Que notre cérémonie du Meilleur Joueur Du Monde attire les plus grands clubs, fédérations et joueurs. Que l’Afrique, et particulièrement le Sénégal, soit au cœur de cette révolution de l’objectivité dans le football. Nous voulons inscrire notre projet dans la durée et en faire un rendez-vous incontournable du calendrier mondial.