Madagascar : un système corruptif et clientéliste en sélection U17

Seule équipe à 0 point du tournoi, plus mauvaise défense (13 buts encaissés en 3 matchs), pire goal-average (-10), la sélection U17 de Madagascar a vécu l’une des pires compétitions de son histoire récente à l’issue de cette compétition organisée par le COSAFA, le Conseil des Associations de Football en Afrique Australe.

Bien loin de leurs standards habituels, comme le confère leur récent rang de finaliste du dernier CHAN, les Barea ont été étrillés par l’Afrique du Sud (5-1), le Malawi (3-1) et la Zambie (5-1). Des performances indignes, bien éloignées de la tournée marocaine du début d’année où les jeunes malgaches avaient passé un mois suite à une invitation du Raja Casablanca et avaient remporté tous leurs matchs amicaux face aux équipes de leur catégorie d’âge ; la seule défaite ayant été face à des U19.

Alors directeur technique de l’académie du Raja, Jean-Marc Nobilo, fut même impressionné par le niveau de plusieurs espoirs en expliquant « que six ou sept pourraient intégrer immédiatement un centre de formation français ». Un compliment pour celui qui occupa des fonctions similaires à Auxerre et à Le Havre notamment.

Un entraîneur sous enquête judiciaire

Pourtant, de ce stage prometteur ne subsiste plus rien. Président omnipotent détestant être contredit, Alfred Randriamanampisoa était intéressé par une seule chose : « Faire des transferts ! »

Pour cela, il souhaitait contrôler complètement l’équipe et a donc imposé Yvon Randrianarisoa, déjà présent lors du stage marocain et sous le coup d’une enquête judiciaire pour avoir exigé de l’argent aux parents des jeunes joueurs (12 000 euros) afin de sélectionner leurs enfants tout en leur promettant également de les emmener dans un club français.

Bénéficiant de la présomption d’innocence, coach Yvon est surtout l’entraîneur d’Elgeco Plus, club dont le propriétaire n’est autre que le président de la fédération. Ne jouissant pas de la licence CAF A nécessaire pour diriger l’équipe nationale au COSAFA, Yvon ne peut cependant être le sélectionneur officiel des U17, un honneur qui revient à Mamonjisoa Ravalison, détenteur du précieux sésame.

Or, ce dernier sert surtout de prête-diplôme puisque les choix techniques reviennent en réalité à Yvon et au président de la fédération, toujours très investi dans sa quête de « transferts » ; un objectif qu’il a répété à de nombreuses personnes ces derniers mois.

Fils du coach et de membres du comité exécutif

Si le staff technique a été chamboulé, l’effectif a été lui complètement bouleversé. Adieu à la quasi-intégralité de l’ancienne équipe (seuls trois joueurs subsistent), bienvenue à plein de nouveaux dont les parents disposent des connexions politiques intéressantes.

Outre le fils du coach Yvon, deux jeunes dont un parent siège au Comité exécutif de la fédération ont été appelés comme un autre joueur disposant d’un lien de famille avec le président de la FMF. Si deux espoirs évoluant dans le club du vice-président (AFC Ambiance) ont logiquement été convoqués, que dire de ce joueur bénéficiant d’une connexion familiale avec une juge ? De quoi s’interroger : est-ce que les jeunes ont été pris en fonction de leur niveau ou du degré d’affinité de leurs parents ?

Pour compléter le groupe, quatre expatriés en Europe étaient choisis officiellement (trois en France, un en Belgique). Néanmoins, la fédération n’a rien fait pour faciliter la tâche des jeunes qui ont reçu leur convocation le 20 août pour un départ trois jours plus tard !

Faux tests d’âge et billets d’avion payés par les parents

Pis encore, la FMF informait les parents qu’elle ne pouvait pas prendre en charge les billets d’avion – alors qu’elle bénéficie pourtant de subventions de la FIFA pour cela. Obligées de débourser plus de 1 000 euros en urgence pour le transport, les familles ont dû encore payer 200 euros pour un test osseux afin de prouver l’âge de leurs enfants pourtant nés en Belgique ou en France.

Officiellement, la fédération avançait que ces jeunes n’avaient pas réussi le premier test osseux qui avait décelé un « âge supérieur » à celui déclaré. « C’était une manière de prendre encore de l’argent », soupire un membre de la FMF désabusé et qui prit l’exemple d’un des meilleurs espoirs malgaches évoluant à La Réunion qui fut ainsi écarté au profit du fils d’un membre du Comité exécutif...

Unanimement dégoûtés par la tournure des événements, plusieurs joueurs ne souhaitent déjà plus revenir en sélection tandis que de nombreuses personnes au sein même de la fédération ont été profondément choquées par les méthodes employées.

Déjà sous le coup de plusieurs polémiques, notamment pour une bagarre avec un joueur dans le championnat local ou pour avoir souvent recours à la menace, le président Alfred Randriamanampisoa s’est déjà tourné vers les prochains matchs qualificatifs à la Coupe du monde de l’équipe A qui peut espérer terminer parmi les meilleurs deuxièmes afin de disputer les barrages.

Quant aux jeunes, humiliés dans ce tournoi COSAFA, leur avenir ne semble intéresser personne, et surtout pas les pontes du football malgache.

NB : contactée, la fédération n’a pas répondu à nos questions.