
Comment vous est venue l'idée de créer le centre de formation ?
Rahim Ouédraogo : Quand j'ai reçu le drapeau en tant que capitaine des Étalons et on est allé en Tunisie pour la CAN 2004, et ça n'a pas marché. J'ai senti vraiment un grand remords. Je me suis dit si nous on n'a pas pu, moi j'allais mettre quelque chose en place, chercher à former des joueurs qui vont un jour nous donner cette Coupe d'Afrique des nations. Donc c'est ça qui est ma mission et c'est dans ça que je me suis investi depuis longtemps. Et vous voyez, il y a plusieurs joueurs de Rahimo aujourd'hui qui sont en équipe nationale, qui sont en train d'apporter leur contribution au développement de notre équipe nationale.
Comment ont été lancées les bases de votre centre de formation ?
Rahim Ouédraogo : Les bases, quand j'ai terminé ma carrière, c'était la création d'un centre de formation qui était mon premier projet. Mais après, je me suis dit, si tu mets tout ton argent dans le centre de formation, ça peut prendre du temps. Et vous savez, pour que ça soit rentable, il faut pouvoir placer les joueurs à l'extérieur pour pouvoir continuer à tourner. Je me suis dit, ça va être trop risqué. C'est là qu'il fallait mettre un business qui allait pouvoir supporter le centre de formation en guise de sponsor. C'est ce qui m'a amené à créer la compagnie de transport d'abord. Quand j'ai mis la compagnie de transport un an après, j'ai commencé à construire le centre de formation. C'est comme ça que c'est parti.
Et aujourd'hui, on a la chance que la société se porte très bien et a été bien accueillie par le peuple burkinabé, qui soutient beaucoup et qui sponsorise aujourd'hui le centre de formation. Ce qui fait qu'on arrive à prendre soin de ces enfants. Comme vous savez, le centre de Rahimo est gratuit. Les enfants, ils viennent faire des tests pendant les vacances. Si tu es recruté selon nos critères, tu es scolarisé sur place, tu es équipé, tout est pris en compte. On a un établissement scolaire dans le centre. Tu vas aller te trouver dans les salles de classe où il n'y a que 5 joueurs, 5 élèves, 7 élèves. Ça coûte très cher, mais on a opté pour ça. Ils sont éduqués, ils sont nourris, ils sont soignés, ils sont logés sur place.
Parlez-nous de votre politique du placement des joueurs ?
Rahim Ouédraogo : Aujourd'hui, il faut savoir que Rahimo est très renommé sur le plan international. Et on est beaucoup respecté. Souvent, quand vous voulez envoyer des joueurs à l'extérieur pour des tests et autres, on vous demande des vidéos et vous savez que c'est pas évident. Avoir de bonnes images et tout. Mais nous, on travaille avec une agence qui est aux Pays-Bas et une fois qu'on sent qu'un joueur est prêt, on les appelle pour que le joueur aille faire un test. Ils nous demandent, on pense à quel niveau le joueur peut aller. On regarde, on contacte une équipe, on les propose. Du fait qu'on est renommé, ils n'hésitent pas, ils nous donnent une invitation et le joueur va faire le test. Si c'est concluant maintenant, on parle du contrat. Donc, ce qui fait qu'on a un réseau.
Vous avez vu la dernière fois, on va dire cette saison, on a placé deux joueurs à Red Bull Salzbourg ou FC Salzbourg (Autriche). Et c'était particulier pour Red Bull qu'ils puissent avoir deux très bons joueurs d'un centre de formation venant du Burkina Faso. Après, ils ont invité toute l'équipe de Rahimo. Vous avez vu, on était tous dernièrement en stage à Salzbourg avec les jeunes. Et quand on est allé, ils ont été impressionnés par le niveau de l'équipe. Mais les joueurs aussi ont découvert beaucoup de choses : le haut niveau, le froid etc. Ils ont des appareils de test pour tester l'intelligence, la réactivité des joueurs, beaucoup de choses. Et dans ce groupe, ils ont retenu quatre joueurs, quatre joueurs normalement qui doivent repartir l'été prochain. Et ils vont les revoir encore s'ils font bien, ils vont les retenir.
Votre saison 2024-2025, vous la finissez avec le titre de champion. Comment ça a été de façon générale ?

Rahim Ouédraogo : Il faut dire que l'entraîneur Njoya Mauril, quand il est venu et a vu l'équipe, il m'a dit, PDG, l'équipe est trop jeune, il faut qu'on cherche des joueurs expérimentés à certains postes. Pour être champion, j'ai dit, chez moi la priorité n'est pas les titres, je ne l'ai pas recruté pour être champion. Je l'ai recruté pour faire progresser les jeunes et pour améliorer le style de jeu de l'équipe. Si l'équipe progresse, les joueurs progressent, forcément il y aura des résultats. C'est dans ce sens que nous sommes allés, on a travaillé et au premier tour on était premiers mais pour dire vrai, en début de saison on n'a pas fixé d'objectif.
Le titre de champion ne vous a pas surpris ?
Rahim Ouédraogo : Non, ça ne nous a pas surpris. Si les joueurs progressent, l'équipe progresse. En connaissant le championnat burkinabé, je savais qu'on avait notre mot à dire, on peut terminer haut. Mais ce que j'ai dit aussi à mes collaborateurs, à un certain moment, ils disent qu'ils veulent le titre. Ça demande trop d'énergie, en réalité. Parce que le premier titre obtenu en 2019, ça nous a coûté trop d'énergie. Chaque fois, il faut être à bout, il faut aller suivre les entraînements, il faut suivre les joueurs, il faut parler. Il y a des matchs où des fois, il faut les motiver. Ça demande trop, trop de choses.
Mais quand on a fini premier au premier tour, au deuxième tour, on a commencé à jouer, à un certain moment, j'ai posé la question aux joueurs à l'entraînement. Qu'est-ce qu'on fait ? Est-ce qu'on va pour le titre ou bien on joue le championnat comme ça ? Ce jour, les joueurs ont dit qu'on va pour le titre. J'ai dit bon, si vous voulez vous battre pour le titre, je serai derrière vous. Mais il faut savoir qu'il y aura des exigences. Donc on ne va pas laisser quelqu'un qui va se déconcentrer ou qui va s'amuser à l'entraînement. Ils ont tous accepté. Donc, c'est à partir de cet instant qu'on s'est focalisé sur le titre de champion.
La Ligue des champions de la CAF, saison 2025-2026. Vous serez sur la brèche vous y pensez ?

Rahim Ouédraogo : On y pense. Nous sommes des compétiteurs. Mais ça ne sera pas facile puisque déjà, comme vous savez, les clubs burkinabè ne sont plus sponsorisés par le ministère des Sports. Les billets d'avion coûtent très cher. Aujourd'hui, j'étais en train de discuter avec une autorité. J'ai dit, s'ils n'aident pas les clubs, ça va être compliqué. L'année passée, on a vu l'EFO. C'était difficile. Si on te dit d'aller jouer au Cameroun, par exemple, où le billet d'avion par personne va coûter au moins 1 million... C'est compliqué pour les équipes burkinabè. Mais nous, on sera ambitieux. C'est ce qu'on peut dire au peuple burkinabé.
Quel regard portez-vous sur le football burkinabé aujourd'hui ?
Rahim Ouédraogo : Le football burkinabé progresse. Mais il y a beaucoup de choses à faire. D'abord, au niveau des infrastructures, on doit beaucoup travailler. Et je pense que les autorités ont compris cela. Ils sont en train de travailler pour vraiment avoir des infrastructures de qualité. Et hormis ça, il nous faut beaucoup de formation au niveau des encadreurs, puisqu'on a besoin des encadreurs, que ce soit ceux qui sont dans les quartiers, ceux qui sont dans les clubs, et il faut qu'on forme. Vous savez, aujourd'hui, quand on parle du football burkinabè, c'est dommage que quand on prend une équipe nationale de petites compagnies, même chez les grands, la majorité des joueurs viennent des centres de formation. On ne voit plus des joueurs qui viennent de clubs mythiques parce que ces clubs mythiques ne forment plus. Ils sont focalisés sur l'équipe première donc ils vont aller débaucher des joueurs. Ce qui fait que ça n'avance.
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