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Bataille des droits TV en Afrique : Canal+ et New World TV face au risque du piratage

La bataille pour les droits de diffusion des compétitions sportives en Afrique sub-saharienne entre Canal+ et New World TV, exacerbe la frustration des abonnés. Une situation qui risque de pousser de nombreux fans vers le piratage, ce qui pourrait entraîner une perte d'abonnés pour les deux diffuseurs si la situation n'évolue pas.

Par Malick Bamba

Canal+ et New World TV sont désormais en concurrence sur le marché des droits sportifs.

La guerre pour la diffusion des grandes compétitions sportives en Afrique francophone sub-saharienne s'intensifie. D'un côté, Canal+, diffuseur historique des grands événements sportifs dans la région. De l'autre, un nouvel acteur ambitieux, New World TV, qui a frappé un très grand coup en raflant les droits de diffusion exclusifs de la Coupe du monde 2022 au Qatar et, plus récemment, de l'Euro 2024 et de la Ligue des champions de l'UEFA. Mais cette bataille, qui semble à première vue être un duel entre titans, pourrait bien se solder par une défaite commune des deux groupes, avec un autre gagnant inattendu : le piratage.

L'échec de la communication : une brèche exploitée par le piratage

New World TV, en décrochant les droits exclusifs de la Ligue des champions pour les 26 pays de la région, a fait souffler un vent de renouveau dans le paysage audiovisuel africain. Beaucoup ont dans un premier temps salué l'arrivée d'une concurrence qui, a priori, aurait pu profiter au consommateur. Sauf que cette percée s’est accompagnée de lourdes difficultés liées à la communication et à la distribution. Beaucoup d’abonnés, habitués à Canal+, ont découvert trop tard que leur diffuseur historique n’avait plus les droits complets de la Ligue des champions. Ils se sont réengagés, pensant pouvoir suivre les matchs, alors qu'en réalité, Canal+ diffusera seulement les meilleures affiches de chaque journée et un magazine dédié le mercredi.

De l'autre côté, New World TV peine à se rendre accessible malgré les sous-licences vendues à plusieurs chaînes publiques africaines. Sa distribution est limitée dans certaines zones, et la communication minimaliste de la chaîne togolaise laisse les amateurs de football européens dans l’ignorance. Certains ne sachant même pas que New World TV détient les droits de diffusion, d'autres ignorant comment s'abonner ou n’ayant tout simplement pas accès au service dans leur région. Une situation qui crée une frustration chez les amateurs de football, qui, privés d'une solution simple et claire, se tournent vers des méthodes alternatives : le piratage.

Un piratage déjà bien ancré en Afrique sub-saharienne, qui pourrait connaître une nouvelle expansion. Les fans, désespérés de ne pouvoir suivre leurs équipes favorites, n’hésitent pas à contourner les obstacles en accédant illégalement aux diffusions via internet. Cette tendance risque d'être exacerbée par l'absence d'une offre claire et accessible pour la Ligue des champions, une compétition qui s'étale sur toute la saison, là où l'Euro, la CAN ou le Mondial n'excèdent pas 4 semaines.

Canal+ contre-attaque… en anglais

Face à la montée en puissance de New World TV, Canal+ a trouvé une parade en ouvrant son bouquet anglophone à ses abonnés via les chaînes de SuperSport Football et SuperSport Football Plus qui diffusent la LDC en anglais. Sans changer de décodeur et moyennant un supplément à leur abonnement de base allant de 2000 à 5000 francs CFA, les abonnés peuvent ainsi accéder à ces chaînes et suivre les rencontres. Formule qui a déjà fait ses preuves lors du Mondial 2022, avec succès.

Ainsi, les matchs de la Ligue des champions sont disponibles en anglais, un avantage pour Canal qui tente de fidéliser sa clientèle malgré la perte des droits de diffusion complets. Mais cette stratégie reste une solution temporaire, et elle ne résout pas les attentes d’un public francophone qui s’est habitué à suivre les commentaires dans sa langue. De plus, elle ne fait que souligner la complexité croissante du marché de la diffusion sportive en Afrique.

Une concurrence au détriment des abonnés

Cette situation met en lumière un problème fondamental : la confusion que cette bataille crée pour les consommateurs. Avec deux acteurs se partageant les droits, les abonnés ne savent plus où se tourner pour suivre leurs compétitions préférées. New World TV, malgré ses efforts pour se positionner en tant que nouveau leader, n'a pas encore su bâtir une infrastructure de communication solide et une distribution suffisamment large pour rivaliser pleinement avec un acteur très bien implanté et qui jouit d'une notoriété supérieure. Deux ans après le coup du Mondial 2022, la chaîne togolaise marque le pas et semble ne pas avoir une stratégie définie. Preuve avec ses audiences durant la CAN 2023 et l'Euro 2024.

De son côté, Canal+ ne propose qu'une solution partielle, insuffisante pour satisfaire pleinement les amateurs de football. Les nombreux griefs adressés par les amateurs de ballon rond sur les réseaux sociaux pendant l'Euro 2024 ou depuis ce 17 septembre et le début de la campagne de Ligue des champions en sont la parfaite illustration.

Si cette situation perdure, elle pourrait conduire à une chute des abonnés pour les deux groupes. Les consommateurs, frustrés, risquent de se tourner de plus en plus vers des moyens illégaux pour accéder aux compétitions. Le piratage, déjà bien présent, pourrait devenir la norme pour de nombreux fans de football en Afrique sub-saharienne.

Un marché sportif à redéfinir

L'enjeu pour Canal+ et New World TV ne se limite pas seulement à une bataille pour les droits de diffusion. Il s'agit de redéfinir l'accès aux compétitions sportives dans une région où le sport est une véritable passion populaire. Si les deux groupes ne parviennent pas à répondre aux attentes des consommateurs en matière de simplicité, de disponibilité et de coût, le risque est grand de voir se multiplier les plateformes de streaming pirate, au détriment de l’industrie audiovisuelle légale. Tout un éco-système s'en trouverait chamboulé.

Les deux entités, bien qu'en position de force dans le marché des droits sportifs en Afrique, risquent de se retrouver les grands perdants de cette bataille. Pour éviter ce scénario, les deux diffuseurs devront revoir leur approche, notamment en matière de communication et de distribution, afin de proposer une offre claire et accessible pour le plus grand nombre. La course aux droits sportifs ne pourra être gagnée que si elle s’accompagne d’une stratégie solide pour conquérir et fidéliser les abonnés, tout en réduisant l'attractivité du piratage.

Malick BAMBA

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