Les clubs de première division de Côte d'Ivoire s'insurgent contre la Fédération ivoirienne de football au sujet des droits de diffusion de la Ligue 1 Lonaci. Initialement interdits de filmer et exploiter les images de leurs propres équipes, ils pourraient finalement voir la FIF revenir sur sa position.
Depuis plusieurs semaines, le championnat ivoirien de Ligue 1 est le théâtre d’un affrontement inattendu, mais tout aussi passionné que les matchs sur le terrain. Un bras de fer qui oppose la Fédération ivoirienne de football (FIF) aux clubs locaux au sujet des droits de captation et de diffusion des rencontres. Un conflit révélateur d'enjeux plus complexes autour des droits télévisés dans un football en quête de professionnalisation.
Interdiction stricte de filmer la Ligue 1 Lonaci
Le 5 novembre 2024, la FIF adressait une circulaire aux clubs, leur interdisant catégoriquement de filmer les matchs des championnats locaux, y compris pour leurs archives internes. Cette décision s’appuyait sur un contrat d’exclusivité signé avec Canal+ International, accordant au géant médiatique les droits exclusifs de captation et de diffusion des rencontres de la Ligue 1 Lonaci.
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Si ce partenariat semble viser à donner une visibilité accrue au championnat ivoirien, la restriction imposée aux clubs a rapidement suscité un tollé. Les staffs techniques, notamment, ont dénoncé un frein à leur travail d’analyse. « Cette décision a un très mauvais impact. On ne peut plus analyser les matchs pour identifier les problèmes de jeu et travailler dessus », s’insurgeait Ousou Lumor Israël, entraîneur de Mouna FC.
Un premier assouplissement
Face aux critiques croissantes, la FIF a adopté une position plus souple ces derniers jours. Sans publication officielle pour l'heure, les clubs ont été autorisés à filmer leurs matchs, mais uniquement pour des besoins techniques ou d’archivage. Sport-Ivoire rapporte par exemple que lors de la 11ᵉ journée de la Ligue 1 Lonaci, les staffs médias de SOL FC et de l’ASEC Mimosas ont pu capter des images de leur match au Stade Municipal de Bingerville. Une première avancée en vue d'un apaisement.
Cependant, l’interdiction de diffuser ces images, que ce soit en direct ou en différé, sur les plateformes de communication des clubs reste en vigueur. La FIF rappellant que les droits de diffusion appartiennent exclusivement à Canal+, une clause essentielle du partenariat signé avec l’opérateur.
Crise de confiance entre clubs et Fédération
Si cet assouplissement répond en partie aux besoins des clubs, il ne met pas fin aux tensions. Plusieurs présidents de clubs réclament désormais des éclaircissements sur les termes du contrat avec la chaîne cryptée. « Nous comprenons l’importance d’un partenariat pour développer le championnat, mais il faudrait que la FIF nous implique davantage. Nous avons besoin de savoir comment ce contrat sert aussi les intérêts des clubs », a confié sous couvert d’anonymat un dirigeant d’un club de Ligue 1.
Pour beaucoup de clubs, le monopole de Canal+ sur les images des matchs soulève également des questions sur la visibilité des équipes. En privant les clubs de la possibilité de partager des extraits ou des moments forts sur leurs réseaux sociaux, la FIF limite leur capacité à attirer sponsors et supporters, dans un contexte où la communication numérique est devenue cruciale.
Enjeux financiers et stratégiques
Ce bras de fer met en lumière les défis financiers des clubs ivoiriens, qui peinent déjà à équilibrer leurs comptes. Si le partenariat avec Canal+ devrait théoriquement injecter des revenus dans le championnat, les clubs dénoncent un manque de transparence sur la redistribution des bénéfices puisqu'ils n'ont aucune connaissance de la nature et des détails du contrat signé.
Une situation qui illustre également un problème plus large : la difficulté des fédérations africaines à trouver un équilibre entre la recherche de revenus à travers des partenariats lucratifs et le développement durable des clubs locaux.
Alors que la situation reste tendue, des observateurs espèrent que la FIF et les clubs de Ligue 1 Lonaci trouveront une solution satisfaisante pour toutes les parties. La professionnalisation du football ivoirien passe nécessairement par des partenariats solides, mais aussi par une collaboration étroite entre la Fédération et les clubs.
En attendant, sur le terrain comme en dehors, le championnat de Ligue 1 continue de captiver les passions. Mais pour que cette ferveur soit pleinement exploitée, il faudra apaiser les tensions et clarifier les enjeux autour des droits de diffusion.