Le championnat professionnel de basketball du Bénin a fait son retour le 18 novembre dernier pour le compte de la saison 2023-2024. Sport News Africa a rencontré les acteurs pour faire un état des lieux de la discipline en quête de modèle de développement dans la dernière décennie.
De notre correspondant au Bénin
La saison sportive 2022-2023 n'a pas été prolifique pour les équipes du Bénin aux compétitions internationales. A côté d'Elan Coton BBC éliminé au premier tour de la Road To Bal, les sélections nationales, qui ont signé leur retour sur la scène africaine depuis Abidjan 2017, ont réalisé un bilan mitigé. L'équipe locale a terminé avant-dernière avec une seule victoire aux éliminatoires de l'Afrocan. La sélection dames classée sixième aux Jeux de la francophonie 2023 à Kinshasa n'a pas fait mieux.
Pour les observateurs avertis du basketball au Bénin, ces performances sont la résultante des maux dont souffre la pratique. « Notre championnat est devenu régulier depuis 2019, et dire que ce n'est pas encore ça. Tous les clubs n'ont pas les mêmes moyens. Certains manquent cruellement d'ambitions, de staff au complet, de centre de formation et même de simple moyen de transport des joueurs », alerte Samadi, ce passionné de basketball à Abomey-Calavi.
« Des préparations où les équipes naissent à la veille de la compétition... »
Pour Lewis Ahissou, entraîneur principal de l'équipe dame, entraîneur adjoint de la sélection locale du Bénin et coach de Bosco Star, le manque de moyens financiers et l'inexpérience justifient ces résultats. « Les résultats se traduisent par l'inexpérience. Nous avons à apprendre et à évaluer nos compétences techniques. Le déséquilibre financier entre les clubs constitue handicap de nos prestations à international », fait-il remarquer.
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Sur les causes des échecs à l'international, Aurélius Kouko, ancien entraîneur des sélections nationales du Bénin et du club ASPAC BBC pointe du doigt l'impréparation. « La mauvaise gestion du temps, des préparations où les équipes naissent à la veille de la compétition et on invite le coach à faire ce qu'il peut. Si ça doit marcher, tout dépendra de la politique du développement et de l'organisation mis en place par la fédération nationale », insiste t-il.
« Les clubs peinent parce qu'on n'a pas su préparer la relève »
Au Bénin, le ministère des Sports a enclenché depuis 2020 la marche vers la professionnalisation. A la Fédération béninoise de basketball, on est passé du championnat linéaire à une Ligue conférence semblable à celle de la NBA. La saison écoulée, les joueurs et entraîneurs de trois clubs à section féminine avaient été sanctionnés et exclus du championnat pour boycott de la première journée de compétition alors que celles-ci revendiquaient des changements. La totale, sera le championnat féminin disputé avec seulement deux équipes.
Christian Quenum, coach de Renaissance BBC estime que les conflits entre acteurs et l'absence d'une relève sont sources du faible niveau constaté. « On n'a pas besoin du phare pour constater que le niveau est bas. On a eu de belles équipes et de bons joueurs par le passé, mais la relève n'a pas pu être assurée. Auparavant, il n'y avait qu'un groupe d'initiés qui était envoyé aux différentes formations. Quand ils revenaient, il n'y avait pas de partage avec les autres, c'était un peu individualiste. Je jette vraiment la pierre à nous-mêmes d'abord, aux entraîneurs, et puis à nos anciens. Il y avait des formes d'opposition et d'inculture de la crainte de l'autre. Il n'y avait pas une bonne ambiance autour du basketball. Sinon, on avait d'excellents athlètes et ça aurait pu nous mener très loin. »
« On devrait par exemple exiger à chaque club pro d'avoir des équipes de catégorie de jeunes. Si vous ne formez pas, vous serez obligé de toujours recourir aux joueurs de l'extérieur ou aux joueurs d'autres équipes. Mais ce faisant, il n'y aura pas de compétition. Au niveau des dames, c'est l'hécatombe. Les jeunes filles abandonnent l'activité », regrette le technicien.
«Assurer la formation à la base et soutenir la génération actuelle»
Le diagnostic ainsi posé, il s'avère nécessaire pour l'ensemble du mouvement du basketball béninois de retrousser les manches pour développer au mieux la balle au panier à travers le pays. Un joueur du championnat qui a requis l'anonymat suggère la formation à la base et l'accompagnement des jeunes.
« Pour moi, il faut travailler sur la formation à la base et soutenir la génération actuelle. Ceci a déjà commencé avec les classes sportives. Et ceux-là qui ne sont pas scolarisés et qui aiment le basket ? Il faut pouvoir récupérer ces éventuels talents pour insertion dans les centres ou académies. À court terme, il faut motiver la génération actuelle, qui est un mélange de joueurs qui ont eu la chance de passer par les catégories d'âges. Ils ont été plus ou moins suivis. Les joueurs ont envie de travailler dur et tout donner mais il faut un minimum de soutien », diagnostique t-il. « Une autre politique qui pourrait bien marcher, c’est de faire voyager les jeunes talentueux, les frotter au climat du haut niveau. Quand ils finiront leur apprentissage, ils pourront revenir jouer pour le Bénin» a complété le joueur.
L'unité et la formation de l'ensemble des acteurs de la chaîne de basketball devraient en effet permettre au Bénin de relever le niveau de son basketball les prochaines années. Cette politique a commencé assure Christian Quenum. « Aujourd'hui, les entraîneurs essaient de se mettre ensemble, essaient de partager. Je suis content de voir que la fédération a décidé d'organiser des formations après quatre ans. Il y a un lot d'entraîneurs qui ont été récemment formés au level 1 FIBA. Je vois les arbitres aussi se faire former. Il n'y a rien sans la formation », note t-il. Les multiples démarches entreprises pour avoir une réaction de la Fédération béninoise de basketball n'ont pas eu de suite favorable.