Le milieu de terrain Moustapha Name va découvrir au Cameroun la Coupe d’Afrique des nations avec le Sénégal. Une belle récompense pour celui qui est actuellement un cadre au Paris FC, son club et qui attend encore son heure en sélection. Pour ses proches, il n’y a aucun doute: Name est le présent et le futur des Lions. Retour sur l’itinéraire d’un joueur doué au parcours sinueux.
Le Sénégal entame ce lundi sa 16ème participation à la CAN avec son armada de stars. Édouard Mendy, Kalidou Koulibaly, Idrissa Guèye ou encore Sadio Mané. Remplaçant dans cette sélection depuis sa première convocation en novembre 2020, Moustapha Name est l’une des belles pépites du football local sénégalais.
Le milieu de terrain de 26 ans a traversé beaucoup d’épreuves pour arriver à ce niveau. De son passage au mini-foot à son explosion à Pau en passant par la désillusion en Belgique, l’enfant de Liberté 4 a toujours cru en sa bonne étoile.
C’est d’abord dans les études que le jeune Moustapha brille. À l’époque, jusqu’alors, personne n’avait vu l’influence du football sur lui. « Il était très brillant à l'école, se souvient son père. Il était dans les trois premiers. Mais petit à petit il commence à faire l'école buissonnière pour aller jouer au football. Il était aussi doué au football. Quand sa mère l'a constaté, elle me l'a dit. J'étais un peu surpris vu ses résultats scolaires. Je lui ai dit que si c'était son choix, il n'avait qu'à l'assumer et que j'allais l'accompagner » confie Saliou Name.
Soutenu par sa famille, c’était désormais à lui de jouer. Et les prédispositions étaient déjà là. Un héritage familial. Le papa de Moustapha Name a également fait une carrière de footballeur. Il était attaquant à son époque durant les années 1970, début années 80 au club historique du Dial Diop. Il évolue également à l’AS Police. Tout comme son oncle maternel surnommé Grand Mbodji et ancien pensionnaire de l’US Gorée. Mais celui qui a sans doute transmis la fièvre du ballon rond au petit Moustapha, c’est son grand frère El hadj Abdoulaye Name.
L’ancien joueur de l’AS Douanes jusqu’en 2006 n’hésite pas à emmener son petit frère humer le parfum des terrains du championnat sénégalais et des Navétanes (célèbre championnat populaire de quartiers). « Quand je jouais au Sénégal, je l’emmenais toujours avec moi, se souvient Abdoulaye Name. Aux entraînements et parfois aussi au stade. Il a toujours baigné dans le football, il y est né et il y a grandi. » En 2006, il quitte le Sénégal pour découvrir le football portugais. Moustapha Name alors âgé de 11 ans prend le flambeau pour suivre les traces de son grand frère. « Beaucoup de gens le comparaient à l’époque à son grand frère Abdoulaye Name, qu'il concurrençait » lance fièrement le papa Saliou Name.
Formé à l’académie de football de Dakar Sacré-Cœur, Moustapha Name exhibe très vite son aisance technique. En 2015, ses essais au club de Lokeren sont concluants. Alors qu’il pensait toucher au but, des problèmes administratifs l’empêchent de débuter sa carrière dans le championnat belge. Il patiente plusieurs semaines et décide finalement de jouer dans le championnat local. Un épisode qui prouve la maturité précoce du joueur de 20 ans. « Il est allé en Belgique mais ce n’était pas évident, souligne son ancien coach à l’AS Douanes. Il a quand même eu le courage de revenir au pays pour se relancer. Et cela c’est la marque des grands. Ça montre que c’est quelqu’un qui croît en lui et en ses qualités » ajoute Joseph Senghor.
À son retour de Belgique, il découvre le championnat sénégalais. Et comme c’était écrit d’avance, c’est à l’AS Douanes, dernier club local de son grand frère Abdoulaye, où il signe en 2016. En 2018, sa carrière explose avec les Gabelous. Name étale son immense talent sur la Ligue 1 sénégalaise en inscrivant 12 buts. « C’est un bon milieu de terrain avec une belle maîtrise technique. On l’utilisait comme milieu relayeur à l’époque, se remémore Jo Senghor. On avait une sentinelle devant la défense. Lui et Modou Birame Ndiaye étaient juste devant en relayeurs. De par sa compréhension du jeu et son aisance balle au pied, il était précieux dans l’entrejeu. Mais c’est dans sa capacité de projection qu’il a le plus excellé. Cette saison-là il avait marqué beaucoup de buts. »
En 2018, le Sénégal met en place sa sélection en prévision de la première Coupe d’Afrique de mini-foot. Name fait partie du groupe du coach Cheikh Sidy Ba, finaliste de la compétition et médaillé de bronze à la Coupe du monde à Nabeul en Tunisie un an plus tôt. Ses qualités techniques expliquent l’importance qu’il a eue dans le parcours du Sénégal en mini-foot. Plutôt introverti, Name n’en était pas moins un leader de groupe.
« C’est un joueur qui sait se fondre dans un collectif, facile à vivre, plutôt introverti mais dans le travail on sent que c’est un leader. Ce n’est pas un meneur d'homme mais plutôt un leader par son charisme et son aisance technique (...). C’était le leader technique de l’équipe au point que j’ai voulu en faire le capitaine. Mais l’AS Douanes avait une façon de fonctionner qui privilégie l’ancienneté pour le capitanat » décrit le coach Jo Senghor.
À l’été 2018, Moustapha Name retrouve l’Europe en 3ème division française, du côté de Pau FC. Le Sénégalais est un homme plus mûr à 23 ans et s’affirme dès sa première saison. Il confirme la saison suivante se montrant plus décisif. En attendant l’équipe nationale A, le tournoi UFOA 2019 sera son premier tournoi international. « J’étais sélectionneur adjoint de Serigne Saliou Dia et on avait la possibilité de faire appel à des expatriés pour le tournoi. J’ai donc demandé au coach de regarder Moustapha Name qui a fait ses preuves au Sénégal mais qui n’avait jamais été appelé dans les sélections. Mais ce n’était pas des fenêtres FIFA. Name s’est débrouillé pour se libérer malgré la réticence de son club » conte coach Joseph Senghor.
Bien lui en a pris! Il réalise une compétition aboutie qui lui offre une visibilité au pays, qui n’a pas laissé insensible Aliou Cissé à en croire coach Jo Senghor. « Il a été titulaire à tous les matchs, a fait un très bon tournoi et le Sénégal a remporté la Coupe UFOA. Je crois qu’il a marqué les esprits depuis lors et le sélectionneur Aliou Cissé a pu s’en rendre compte. » Un an plus tard, il est appelé en équipe nationale A par Aliou Cissé lors de la double confrontation face à la Guinée Bissau. Ses performances en club et sa polyvalence poussent Aliou Cissé à le convoquer régulièrement dans la tanière. Et le bonheur suprême arrive en fin décembre 2021 quand la liste des 27 Lions dont Moustapha Name est rendue publique.
« C’est une grande fierté de voir mon jeune frère sélectionné pour disputer une compétition aussi importante qu’une CAN » s’émeut Abdoulaye Name. Même son de cloche chez Momo Cissé. L’ancien défenseur de Teungueth FC et grand ami de Name espère juste plus de temps de jeu pour son voisin au Liberté 4. « Sa sélection pour la Coupe d'Afrique ne m'a pas surpris. Je le connais assez pour dire que c'est mérité, vu ses prestations avec le Paris FC et ses qualités (...). Je ne souhaite qu'une chose : que le sélectionneur le fasse jouer une fois à son poste au milieu, je suis convaincu qu'il ne ressortirait plus du 11. C’est un box-to-box comme on en voit rarement dans notre football. On le surnommait Paul Scholes. »
« Paul Scholes » s’est même permis de contrarier son grand ami lors d’une affiche du championnat local en 2018 raconte Momo Cissé. « On n'a jamais joué ensemble. Il a toujours été mon adversaire. Un jour, alors que j'étais à Teungueth FC et lui à l'AS Douanes, nous avons fait face. On nous avait promis une prime de 250.000 francs en cas de victoire. Ils ont mené très vite 1-0. Je ne lui ai pas fait de cadeau durant le match. À chaque fois, quand je lui faisais un tacle, il allait se plaindre chez l'arbitre. Il me disait : ‘’ mais grand Momo, ne me dis pas qu’à cause de 250.000 CFA, tu veux mettre fin à ma vie (rires)?’’. Au coup de sifflet final, il n'y a pas eu de vainqueur. Nous avons égalisé en toute fin de partie et il m'a enlacé. »
Moustapha Name, un futur cadre de cette sélection pense le coach Jo Senghor. « Je ne doute vraiment pas de ses qualités. Je sais que son heure ne devrait plus tarder en équipe nationale (...) Il ne manque à Name que la responsabilisation en équipe nationale. Mais c’est normal que ça prenne du temps parce que le sélectionneur a son équipe type. Il peut nous valoir beaucoup de satisfaction car il comprend le jeu, il est polyvalent. Au milieu, il peut évoluer comme sentinelle ou relayeur. »
Moustapha M. SADIO