Les U23 de la Tunisie ne prendront pas part à la CAN au Maroc encore moins aux Jeux Olympiques de Paris 2024. Les Aiglons de Carthage ont en effet été sortis dès le 2e tour des éliminatoires de la CAN U23 par les Congolais de Brazzaville, dimanche 30 octobre. Une véritable désillusion. Mais le problème ne se limite pas aux Olympiques. Chez les U17 et les U20, la Tunisie a même du mal à figurer sur les podiums en Afrique. Mais pourquoi les petites catégories au pays des Aigles de Carthage n’y arrivent pas ?
En 13 éditions de la CAN U17, la Tunisie s’est hissée une seule fois sur le podium. C’était en 2013 au Maroc où les jeunes Tunisiens avaient terminé à la 3e place. Pour la CAN U20, la Tunisie a atteint une seule fois la finale. C’était en 1985. Il y a 37 ans. Une éternité. Il a fallu attendre 2021 pour revoir les Aiglons de Carthage sous la houlette de Maher Kanzari accéder en demi-finales et finir à la 4e place. Et en ce qui concerne la CAN U23, la Tunisie n’a jamais été dans le dernier carré contrairement à l’Egypte ou au Maroc.
Dimanche 30 octobre au stade de Radès, les choses ne sont pas arrangées non plus. Le gardien de Rennes, Elias Damergy, qui a déjà encaissé 5 buts en 3 matches de National 2 et sans la moindre rencontre disputée en Ligue 1 française, a commis une bourde qui a entrainé la réduction du score (2-1 match aller 1-0) par le Congolais, Gloire Bassinga. Un but synonyme d’élimination pour la Tunisie. Le sélectionneur Maher Kanzari et le malheureux portier Damergy ont été pris pour cible après l’élimination. Mais rien ne présage que la Tunisie aurait franchi le dernier tour des qualifications. Entre des joueurs peu aguerris faute de temps de jeu conséquent en club, un championnat des jeunes à l’arrêt ces dernières années et une Espérance de Tunis, 6 fois d’affilée championne de Tunisie sans un seul U23 tunisien parmi ses titulaires indiscutables, le mal est plus profond.
Club le plus titré de la Tunisie, l’Espérance de Tunis règne sans partage sur la scène nationale depuis 2017. Avec déjà 4 Ligues des champions CAF dans ses armoires, la formation de Bab Souika est la seule au pays des Aigles de Carthage qui a comme ambition de remporter la LDC CAF. D’ailleurs, c’est la seule qui franchit ses dernières années sans difficulté la phase des groupes de la compétition la plus prestigieuse pour les clubs africains. Mais Maher Kanzari et Adel Sellimi (coach des U20) ne peuvent pas compter les jeunes Tunisiens qui ont brillé la saison précédente sous les couleurs des Sang et Or.
Le joyau des Espérantistes, Mohamed Ali Ben Romdhane, a déjà 23 ans comme le gardien Mohamed Sedki Debchi (23 ans) qui aurait pu sauver la Tunisie. Quant au meilleur buteur du championnat la saison passée, Mohamed Ben Hammouda (24 ans) a déjà dépassé l’âge pour être aligné dans les petites catégories du pays. Ce sont ces jeunes qui ont l’habitude de se frotter aux meilleures équipes africaines lors des grandes soirées de la LDC CAF. L’obligation de résultats immédiats fait que les entraineurs ne peuvent pas se permettre d’accorder un temps de jeu conséquent aux jeunes du club. En effet, le milieu défensif, Mootez Zaddem (21 ans) aligné face au Congo et l’attaquant Zied Berrima (21 ans) ne sont que des remplaçants chez les champions de Tunisie.
Juste après la défaite (2-0) de la Tunisie face à la Syrie en Coupe arabe, le technicien français Bertrand Marchand, grand connaisseur du foot tunisien avait remis en cause le format du championnat et la gestion des petites catégories. «Nous avons deux poules de 8. On a fait 7 matches. On attend deux mois pour faire encore 7 matches. En 3 ans, les joueurs auront fait un championnat et demi. Je pense qu’il faut revoir ça. Cela fait deux ans et demi que les championnats de jeunes sont arrêtés. Les jeunes sont à la dérive», avait déploré le coach Bertrand, vainqueur de la Ligue des champions CAF avec l’Etoile du Sahel en 2007. Il a été plus explicite en ce qui concerne le potentiel des jeunes Tunisiens «Quand je suis arrivé en Tunisie en 2005, je suis allé chercher les jeunes internationaux espoirs de qualité. Ils ont permis aux clubs d’être champions d’Afrique et l’équipe nationale de faire de bonnes CAN. Quand je suis revenu, je n’ai plus trouvé le potentiel de jeunes joueurs qu’il y avait avant.».
Le format des deux groupes 8 équipes a été maintenu cette saison encore. Et dans l’effectif de Maher Kanzari, Alaa Ghram (21 ans, 50 matches TCC) et Mohamed Mazraoui (20 ans, 31 matches), défenseurs du CS Sfaxien sont les rares qui peuvent se targuer d’avoir plus 30 rencontres avec l’équipe première de leur club. Les jeunots du Club Africain bénéficient également d’un temps de jeu conséquent ces trois dernières saisons en raison des difficultés financières du club. D’ailleurs, Hamdi Labidi (20 ans, 37 matches TCC) et Adem Garreb (19 ans, 26 matches), buteurs face au Congo, évoluent dans cette formation de Bab Jedid dirigée par Bertrand Marchand. Dans les autres clubs se sont des joueurs étrangers surtout des Algériens qui sont souvent alignés. En attaque, les étrangers sont les plus utilisés. L’EST est une armada d’internationaux issus de tous les pays du Maghreb.
En plus de cela, sans date FIFA pour ces éliminatoires de la CAN U23, les clubs européens ont logiquement retenus leurs joueurs clé éligibles pour ces joutes. Ainsi, les jeunes expatriés titulaires dans leur équipe et capables de faire la différence comme Hannibal Mejbri (19 ans, Birmingham FC) et Anis Ben Slimane (21 ans, Bröndby IF) n’ont pas eu l’opportunité de faire le déplacement pour défendre les couleurs nationales.
Ablaye DIALLO