Au Congo-Brazzaville, du fait de l’insuffisance de moyens, combinée à la crise qui secoue la fédération, le cyclisme est à l’arrêt depuis des années. Des particuliers viennent d’organiser une course afin de favoriser « un grand réveil du cyclisme congolais ».
De notre correspondant à Brazzaville
«Au Congo aussi on organise des compétitions de cyclisme ? Je n’en crois pas mes yeux !», s’étonnait dans la matinée du 9 janvier dernier, Prince Poaty, un adolescent de Pointe-Noire, émerveillé devant une quarantaine de cyclistes sur leurs vélos attendant le top départ. Ce dimanche là en effet, se déroulait la première édition du «Challenge MDA» (M’pinoba d’Ankelé Andropov), du nom de son initiateur, premier vice-président de la Fédération congolaise de cyclisme (Fecocy).
Il s'agissait d'une course de 110 kilomètres soit un trajet de 11 kilomètres parcourus en dix tours à travers les rues et avenues de la capitale économique congolaise. Elle a réuni quelque quarante coureurs venus de Brazzaville et de Dolisie, troisième ville du pays, à quelque 170 kilomètres à l’est de Pointe-Noire.
« L’absence de compétitions tue les talents »
Une compétition certes modeste, mais qui aura valu son pesant d’or. «Au Congo, on ne parle plus du cyclisme. Ça fait très mal», explique M’pinoba d’Ankelé Andropov. Lequel a bénéficié de l’appui de plusieurs sponsors parmi lesquels l’Association Sylvain Goma Rodrigue (ASGR), spécialisée dans l’humanitaire, dont il est membre.
Un constat partagé par la presse locale. «Dans notre rédaction, nous ne commentons que des compétitions internationales telles que le Tour du Faso, le Tour du Rwanda ou le Tour de France», déplore Julien Daniel Missama, journaliste dans une chaîne de radio locale publique.
Si Gloire Nzambé, vainqueur de l’épreuve, s’est montré satisfait du trophée et de l’enveloppe reçus, pour bien de cyclistes congolais, le moment est propice de gagner en visibilité. «C’est le cyclisme
congolais qui renaît de ses cendres, car l’absence de compétitions tue les talents», explique Ghislain Mamboma dit «Japonais», qui a toujours occupé la première place lors des rares compétitions régionales. Une satisfaction à la mesure du manque de compétitions. «Un vélo coûte très cher, environ 1 million de francs CFA (plus de 1524 euros). Tu fais un tel investissement, tu consacres beaucoup de temps à l’entraînement et au finish, tu n’as pas d’opportunité pour jauger ton niveau. Voilà pourquoi, les Congolais sont toujours absents des tournois internationaux», déplore Rodolphe Mpaty, un coureur.
Il y a aussi… et surtout la crise
Des observateurs, évoquent le peu d’intérêt accordé par les pouvoirs publics au cyclisme. «Très souvent, ce sont des entreprises qui organisent des compétitions à l’échelle nationale pour des besoins de visibilité. Mais ces derniers temps, à cause de la crise économique certainement, aucune société ne pense à regrouper les cyclistes», explique Jean Jacques Kimbembé, dit «L’enfant», sexagénaire, champion du Congo en 1984.
La léthargie du cyclisme congolais est aussi due à des crises nées des luttes pour le leadership. À l’image de celle qui oppose Rufin Bakouetana, élu en novembre 2020 à la tête de la Fecocy, à André Tchikaya Loemba, candidat malheureux qui conteste la légitimité du nouvel élu en raison de «l’irrégularité de son élection». Une crise qui connaîtra peut-être son épilogue à la prochaine audience fixée à une date pas encore communiquée.