Indépendante depuis le 2 octobre 1958, ce n'est qu'en 1960 que la première équipe nationale de football de Guinée est constituée. Des joueurs recrutés dans les différents quartiers et les différentes préfectures du pays. Dacky Mbor Camara fut le premier capitaine de l’histoire de la sélection guinéenne. Ce nonagénaire revient sur sa carrière marquée de hauts et de bas.
De notre correspondant en Guinée,
Quelques mois après son accession à l’indépendance, la Guinée va constituer sa première équipe nationale. Sur les ruines des anciens clubs coloniaux, le Syli national verra le jour. Pour se mettre à niveau, la Guinée va rejoindre l’Allemagne et la Hongrie notamment pour des stages de perfectionnement. L'équipe va plus tard briller sur la scène continentale et régionale particulièrement. Aujourd’hui âgé de 90 ans, Dacky Mbor Camara en sera le premier capitaine. Il revient sur cet épisode qui l’a propulsé sur le devant de la scène avec le brassard de la Guinée, fraîchement indépendante. «Au lendemain des indépendances, toutes les équipes coloniales ont été dissoutes pour former une équipe nationale entre 1959 et 60, pour représenter la Guinée à l’international. J’ai été sélectionné à Conakry. Et j’ai été parmi le groupe qui est allé en Hongrie pour jouer. Durant cette période, la Hongrie était une grande nation de football, l’une des meilleures équipes du monde dans les années 1960», explique le nonagénaire. Et d’enchaîner. «Après les sélections des joueurs qui devaient former la première équipe de Guinée, il fallait trouver un capitaine. Il y avait deux candidats mon ami Aboubacar Barate et moi. Pour nous départager, un vote a été organisé. A l’issue de ce vote, j’ai été élu capitaine et Aboubacar Barate Camara a été vice-capitaine. Le groupe a eu confiance en moi. J’étais le plus âgé du groupe d’ailleurs», révèle Dacky Mbor Camara.
Cette équipe nationale avec Dacky M’bor Camara comme capitaine, a connu des moments de gloires mais aussi d’échecs. Ce monument du football guinéen a connu des succès, durant ces années de sélection avec le brassard de capitaine. «À l’époque, il n’y avait pas une grande organisation pour organiser de grandes compétitions sur le continent. Du coup, on jouait la coupe PDG (du nom du parti unique en Guinée). En plus de cela, après nos stages en Allemagne et en Hongrie ou même en Yougoslavie, nous les guinéens, on jouait beaucoup avec les pays de l’Afrique de l’ouest que sont le Mali, la Côte d’Ivoire, le Sénégal entre-autres», se rappelle-t-il. Après la dissolution des clubs coloniaux, on a eu à jouer la coupe PDG que j’ai eu à la chance de remporter. Je fais partie des éléments qui ont pris part à cette compétition. Et à deux reprises. Durant les deux fois où j’ai joué le tournoi, on a remporté deux coupes d’ailleurs», se souvient encore l’ancien capitaine M’bor Camara.
La prison après une défaite
Après l’accession de la Guinée à l’indépendance, le régime va instaurer la terreur. Les opposants sont emprisonnés pour certains et exécutés pour d’autres. Même les footballeurs ne vont pas y échapper. Nombre d’entre-eux passeront donc par la case prison. Après une défaite face au Liberia, ils étaient nombreux à être privés de leur liberté. «À l’époque, on travaillait dur. Je me rappelle qu’une fois, on a joué un match contre le Liberia. On a perdu (1-0). C’était un match âprement disputé contre le Liberia. Une défaite qui est passée mal aux yeux des autorités, se rappelle Dacky Mbor Camara. Après la rencontre, c’était le purgatoire. Le ministre des Sports de l’époque Toumany Sangaré nous avait convoqués au stade. Arrivé sur les lieux, on trouve un important dispositif sécuritaire. Le ministre nous gronde en nous disant que n’avons pas bien représenté le pays. Il nous a demandé des explications. Juste après, les policiers nous ont embarqué dans des bus pour nous conduire en prison. Là on a passé quelques jours avant d’être libéré», ressasse le nonagénaire.
Le parcours certes semé d’embûches, mais qui témoigne du parcours accompli par ce joueur. Agé de 90 ans aujourd’hui, Dacky Mbor Camara passe ainsi des jours paisibles dans sa concession à Conakry. Tout comme maître Naby Camara ou encore Ibrahima Kandia Diallo, il fait partie de cette première génération de sportifs qui a donné ses lettres de noblesse au sport guinéen dès après l’accession du pays à l’indépendance.
Mamadou Gongorè DIALLO
