Le football camerounais est secoué par une série d’événements dignes d’un véritable feuilleton, dans lequel Samuel Eto’o, ancien footballeur et président de la Fédération Camerounaise de Football (Fécafoot), mène un bras de fer sans précédent contre le gouvernement. En toile de fond : le choix du stade devant accueillir le match Cameroun-Namibie, prévu pour le 7 septembre 2024 dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2025.
Samuel Eto’o un, Narcisse Mouelle Kombi zéro. Le match entre le président de la fédération camerounaise de football (Fécafoot) et le ministre camerounais des Sports a livré un autre verdict ce mercredi. Ainsi donc, le Cameroun affrontera la Namibie le 7 septembre dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2025, dans la ville de Garoua. Comme Samuel Eto’o l’a toujours souhaité, malgré l’opposition du ministre et du gouvernement qui, eux, militaient pour le stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé. La sanction est donc tombée ce mercredi, à l’issue d’une rencontre entre le Premier ministre Joseph Dion Ngute et les cadres de la sélection.
Le Chef du gouvernement est allé droit au but en demandant aux joueurs s’ils souhaitent que le Cameroun perde à domicile contre la Namibie sur tapis vert. Une question à laquelle les joueurs ont vite fait de répondre par la négative. Alors « où voulez-vous jouer ? », aurait demandé le Premier ministre. Malgré quelques hésitations, les joueurs, bousculé par un Zambo Anguissa visiblement agacé par toute la polémique autour de la situation, ont répondu « à Garoua ». Le vice-capitaine des Lions Indomptables aurait lancé à ses coéquipiers : « la désobéissance à la Fédération va déjà trop loin, allons à Garoua... ». Après discussion, le Premier ministre, ayant pris en compte la position des joueurs, a dit s’en remettre à la CAF : « si la CAF décide, avec les arguments qui ont été fournis, que nous allons jouer à Garoua, nous irons jouer à Garoua ».
Si le bras de fer avec le ministère des sports est loin d’être terminé, cette accalmie apparente fait bien les affaires de Samuel Eto’o. Le patron de la Fécafoot n’a ménagé aucun effort pour faire entendre – et respecter – le choix de la fédération qu’il dirige depuis décembre 2021. Alors que les joueurs ont boycotté le programme de préparation initialement mis en place par la Fécafoot en ne se présentant pas au lieu du regroupement à Douala, le président de la Fécafoot lui, a activé un plan B. Eto’o, déterminé à foncer, était prêt à aligner une équipe bis, composée principalement de joueurs de la sélection U20. Ces jeunes talents, renforcés par quelques joueurs expérimentés, étaient déjà en route pour Garoua à bord d’un vol de la compagnie nationale Camair-Co. Cependant, sur instruction des autorités étatiques, ils ont été débarqués de l’avion à la dernière minute à Douala, un coup de théâtre qui aurait pu compromettre la tenue du match.
La veille déjà, face à la résistance des joueurs, la Fécafoot n’a pas hésité à recourir à des mesures coercitives. Des lettres de menace ont été envoyées aux clubs des joueurs, laissant planer d’éventuelles sanctions contre eux, s’ils restent dans une logique de défiance. « Qu'il soit bien entendu que les 24 joueurs régulièrement convoqués par l'Entraîneur-Sélectionneur National sont attendus au plus tard le 04 septembre 2024 à 08 heures à l'Hôtel la Falaise Bonanjo à Douala. Faute pour eux de se conformer à cette prescription, la Fécafoot prendra toutes ses responsabilités sans états d'âmes conformément au cadre juridique en vigueur », a écrit l’instance faîtière du football.
Le conflit a pris une dimension internationale peu de temps avant, lorsque la FIFA, dans une correspondance adressée au secrétaire général de la Fécafoot, a exprimé sa préoccupation face à la situation. L’instance mondiale a rappelé aux deux parties la nécessité de travailler de manière concertée pour éviter toute sanction qui pourrait nuire à l’image du football camerounais. Cette intervention de la FIFA a servi de rappel que les conflits internes pourraient avoir des répercussions bien au-delà des frontières nationales.
Ainsi, tout au long de cette crise, Samuel Eto’o s’est montré déterminé et téméraire. Son refus de céder face aux pressions gouvernementales et son habileté à manœuvrer dans un environnement hostile conforté par une éventuelle suspension du Cameroun ont forcé le gouvernement à revoir sa position. Toutefois, si ses partisans le célèbrent pour cette « victoire », rien ne semble indiquer que le bras de fer est terminé. Et si Eto’o n’avait remporté qu’une bataille ?