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Sénégal : au coeur des maux du football local

Le Sénégal a toujours affiché un antagonisme voire un paradoxe entre sa sélection qui s’est toujours bien comportée et son championnat qui, hormis les parcours de la JA en 1998 et 2004, affiche un néant en compétions africaines. Le championnat local peine à se développer et ce pour de nombreuses raisons.

Champion du Sénégal, Génération Foot peine à exister sur la scène continentale.

Le Sénégal sort d'une période faste qui a vu ses différentes sélections remporter la CAN, la CAN U20, la CAN U17 et le CHAN. En compétions interclubs en revanche, aucun club n’est parvenu à se hisser ne serait-ce qu’en phase de groupes ces deux dernières saisons. Dernièrement Génération Foot et le Casa Sport ont été éliminés respectivement en préliminaires LDC CAF et en Coupe CAF par des clubs guinéen et burkinabé.

Des académies qui font le travail de formation

Dans sa globalité le championnat sénégalais compte de nombreux talents. Leurs sélections dans l’équipe du CHAN a produit des étincelles avec une victoire finale contre l’Algérie sur ses terres. Idem pour les équipes cadettes et juniors qui ont remporté les CAN de leurs catégories. Les cadets étaient presque totalement constitués de joueurs issues des académies comme Génération Foot, Diambars, Darou Salam et d'autres. Cela montre que le Sénégal a un vivier de talents avec les centres de formations et académies qui pourvoient les sélections jeunes. Les expatriés issus souvent de ces académies complètent le reste des sélections. Et il est permis d’espérer pour l’avenir avec les joueurs qui ont réussi à décrocher des contrats dans des clubs européens.

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En ce sens, au niveau de la formation, le problème ne se pose pas avec la légion de joueurs qui sont issus des sélections jeunes de la génération des Moussa Wagué, Sidy Sarr en passant par celle des Lopy aux derniers des Samba Diallo, Pape Lamine Diop, Lamine Camara et celle cadette avec Amara Diouf.

Joueurs issus des centres et binationaux à la base de la sélection A

La sélection A également peut s’enorgueillir d’avoir l’une des meilleures équipes d’Afrique. Mais celle-ci se compose, pour son équipe qui a gagné la CAN, de joueurs formés par les centres et qui ont achevé leur formation en Europe ou ont peu joué dans le championnat local. Saliou Ciss, Mamadou Loum Ndiaye, Idrissa Gana Gueye, Joseph Lopy, Sadio Mané, Ismaila Sarr, Bamba Dieng, Famara Diédhiou, Habib Diallo, Ibrahima Mbaye ou encore Pape Matar Sarr sont autant d'exemple.

Il y a ensuite ceux, peu nombreux, qui sont issus des clubs locaux : Alioune Badara Faty, Cheikhou Kouyaté parti tôt, Moustapha Name, Pape Abdou Cissé, Abdoulaye Seck. Enfin, il y a la légion des binationaux : Kalidou Koulibaly, Bouna Sarr, Abdou Diallo, Fodé Ballo Touré, Nampalys Mendy, Boulaye Dia, Keita Baldé. Aucun joueur n’a fait ses classes dans le championnat local sinon Abdoulaye Seck et Alioune Badara Faty pour dire que le championnat local n’est donc pas ce qui vaut ses résultats récents au Sénégal.

Les problèmes du foot local

Un championnat fluctuant, dans lequel les champions varient chaque année. Le champion d'une saison peut jouer le maintien ou être relégué la saison suivante. Le niveau est à peu prés le même entre la Ligue 1 et la Ligue 2. Il peut être difficile à vu d’œil de savoir qui est dans l’Elite, et dans les divisions inférieures.

Les centres ont des politiques de vente de leurs meilleurs éléments en Europe. Diambars et Génération Foot perdent chaque année leurs meilleurs éléments en quête d’une vie meilleure. Et en plus c’est le modèle économique du club pour pouvoir assurer leurs frais de fonctionnement et pérenniser leurs projets. Ils y réussissent en se renouvelant constamment. Génération Foot des Dino Djiba jusqu’au Dernier Sané qui a rejoint Metz, produit toujours des joueurs de qualité. Ils n’ont pas pour le moment des ambitions africaines affirmées.

Ensuite, les joueurs qui pourraient être les moteurs de ces projets dans les centres, ceux qui ne sont plus promis à des clubs de premier niveau, préfèrent rejoindre des championnats comme l’Estonie, le Maghreb ou plus récemment l'Afrique de l'Est plutôt que de rester au Sénégal, où les salaires sont trop bas pour assurer leur avenir. Cette modicité des salaires, conjuguée chez les clubs locaux à une certaine précarité, aux conditions d’entraînement, au manque de suivi, au stress concernant l'avenir des joueurs n'est pas un terrain propice pour que les clubs obtiennent des résultats probants. Sans parler du manque d’infrastructures, avec des clubs qui jouent dans des stades municipaux sur-utilisés, avec des pelouses qui laissent à désirer. Peu de place pour le spectacle sur le terrain.

Manque de volonté ou modèle économique bancal ?

Dans le championnat professionnel sénégalais, il y a des clubs des structures étatiques, des sociétés qui devraient pouvoir engager et payer des salaires intéressants aux meilleurs joueurs pour constituer des équipes de talent : la Douane, le Port, la Police, Etics. Malheureusement ces dernières années ces clubs végètent dans les tréfonds du classement, s’ils ne sont pas dans les divisions inférieures. Pourquoi ? Un manque de volonté est décelé.

Aujourd’hui tous essaient de répliquer le modèle Génération Foot et Diambars. Personne ne pense à bâtir un club sur le modèle du TP Mazembe. Certes, leur président est milliardaire, mais le Sénégal n’en compte-t-il pas ? Personne ne pense à investir dans un club pour ensuite récolter les fruits à travers les sommes mises en jeu dans les différentes compétition. Des présidents sont loués pour l’argent qu’ils injectent dans leurs clubs à l’image de ceux du Jaraaf et de Teungeuth. Mais ils n’ont pas les moyens illimités. Pourtant, avec le public qu’ils drainent et un peu de volonté, Pikine Gnarry Tally, HLM Club, Linguère de Saint-Louis, Niambour de Louga par exemple, pourraient organiser leurs clubs sur la base de la participation active des supporters, à l’image des socios en Espagne. Des supporteurs actionnaires cela pourrait être la solution. Mais avec le problème de gérance, du manque de confiance, la tâche ne sera pas facile.

Des recettes inférieures aux dépenses

Ensuite, les sommes mises en jeu pour le championnat et les différentes coupes sont faibles et ne permettent pas aux clubs de pouvoir, sur cette base, avoir des projets à long terme. A titre d'exemple, les primes du champion du Sénégal ne permettent pas de couvrir les dépenses de fonctionnement de 6 mois d’un club local. En 2022, les montants des primes étaient de 35 millions de francs CFA pour le vainqueur du championnat. Dans un football en recherches de liquidités, pourquoi ne pas nommer les Coupes au nom des sociétés qui mettraient en jeu des sommes importantes ? Mais, ces dernières, sont-elles prêtes à aider le football local et à investir de gros montants ?

Aucun club sinon les académies n’ont de stade leur appartenant. Tout est attendu de l’Etat. Pourquoi les clubs n’ont pas de plans d’acquisitions de stade, pour développer les boutiques de clubs (cela commence à se faire), de faire des participations pour pouvoir générer des rentrées d’argent. Là aussi malgré toute la volonté du monde, le prix du foncier est excessivement cher, peu de clubs pourraient se le permettre. Pour ce type de projet, l'Etat pourrait à juste titre aider les clubs à s’émanciper. L’exemple du développement que connait la Tanzanie peut être un modèle à répliquer.

Les Navetanes, un frein à l’envol du football local

Les jeunes joueurs ne sont pas vites lancés dans le bain. On ne leur fait souvent pas confiance. Ces joueurs écument alors les championnats locaux, s’y plaisent et pour certains hypothèquent leurs carrières futures. Au Sénégal c’est une lapalissade de dire que le championnat qui regroupe les quartiers est de loin plus populaire que le championnat dit professionnel. Les stades affichent complet. Des talents qui peuvent prétendre à des clubs de championnat professionnel, à cause du succès des Navetanes, préfèrent le championnat local.

Ce championnat empiète sur le championnat sénégalais, pour au final aucun impact sur le football national ou presque. Prévus pour les vacances, il se poursuit désormais bien au-delà. S’il était même un tremplin avec une limite d’âge de ceux qui y participent, il pourrait être utile. Mais c’est le terrain de l’indiscipline avec des querelles quotidiennes et une explosion de la violence. Difficile de lui trouver de nos jours un intérêt, sinon de créer l’ambiance inter-quartiers. La FIFA avait même à un moment donné, conseillé au Sénégal d’intégrer cette compétition au sein de la Fédération. Chose qui n'a jamais été faite. Autre mauvais choix stratégiques de décideurs, qui, s'ils récoltent une pluie d'éloges pour les résultats des différentes sélections nationales au cours des derniers mois, savent au fond que ces sélections sont juste l'arbre qui cache la forêt d'un championnat local à l'agonie.

Mamadou DIALLO

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