Pour la première fois de leur histoire, la France et le Maroc vont s’affronter lors d’une compétition internationale. Si les Bleus sont favoris, les Lions de l’Atlas, en éliminant l’Espagne et du Portugal, peuvent encore faire tomber un gros. C'est l'avis de l’entraîneur marocain Hassan Benabicha, directeur technique du Wydad Casablanca, et du Français Patrice Beaumelle, ex-adjoint d’Hervé Renard quand celui-ci était sélectionneur de l’équipe nord-africaine. Interview croisée.
De notre correspondant en France,
Sport News Africa : La France doit-elle être considérée comme le favori de cette demi-finale ?
Patrice Beaumelle : Pour moi, oui. La France est championne du monde en titre, c’était un des favoris avant la compétition, c’est évidemment encore plus le cas au stade des demi-finales ! Les Bleus ont fait jusqu’à maintenant un très bon parcours, à l’exception du match perdu face à la Tunisie au premier tour (0-1) avec une équipe très remaniée. Elle n’est pas toujours impressionnante, elle commet des erreurs, mais mentalement, elle est très forte. Elle a des joueurs de très haut niveau, dont Mbappé, et on voit qu’elle veut vraiment aller au bout.
Habib Benabicha : Bien sûr. La France est le favori de ce match, ce qui est tout à fait normal. C’est une équipe qui fait partie des meilleures du monde, elle est championne du monde en titre, elle possède de très grands joueurs et un grand sélectionneur avec Didier Deschamps. La pression sera davantage sur la France, ce qui est logique.
La présence du Maroc à ce stade est-elle une surprise pour vous ?
P. B : Pas du tout. Le Maroc n’était certainement pas attendu à ce niveau, mais s’il y est parvenu, ce n’est pas du tout un hasard. Walid Regragui, le sélectionneur marocain, n’a pas eu beaucoup de temps pour préparer la Coupe du monde. Il a bâti un système pragmatique, avec une bonne organisation défensive, une capacité à resserrer les lignes, et à se projeter très vite vers l’avant. Le Maroc a aussi une vraie qualité technique, un buteur efficace avec Youssef En-Nesyri. C’est une équipe qui a la capacité de produire du jeu, comme elle l’a montré au Qatar. Et puis, il y a ce formidable état d’esprit.
H. B : On ne s’attendait pas à un tel parcours. Mais le Maroc mérite d’être là, car il s’est montré solide, efficace, solidaire. Walid Regragui, en très peu de temps, a réussi à faire adhérer ses joueurs à son système. Quand on voit Ziyech et Boufal effectuer un gros travail défensif, c’est que le coach a réussi son pari. Aujourd'hui, le Maroc peut devenir champion du monde, une chose inenvisageable il y a quelques semaines.
Le Maroc n’a jamais été mené au score. Si cela devait être le cas, à quoi faut-il s’attendre ?
P. B : On peut effectivement se poser la question. Le Maroc serait alors obligé de prendre des risques, d’avoir la possession du ballon, ce qui n’est jamais arrivé depuis le début du Mondial. Les Lions ont de la qualité technique, ils sont capables de produire du jeu. Mais il est évident que si la France marque en premier, cela pourrait être plus difficile pour les Marocains, qui s’exposeraient à des contres français. Et quand on connaît la vitesse de Dembélé et Mbappé…
H. B : Au coup d’envoi, le Maroc cherchera sans doute à faire comme lors des matches face à l'Espagne et au Portugal, en laissant la possession aux Bleus. Le plus difficile pour les Français sera de trouver une faille. Elle a les joueurs pour le faire, et si le Maroc est mené, il sera obligé de changer son plan de jeu. Il en a les qualités, grâce au profil technique de plusieurs de ses joueurs. Mais l’idéal, pour les Marocains, serait d’ouvrir le score, et si possible le plus tard possible.
Alexis BILLEBAULT