Pour ses débuts à la tête de la sélection des Comores, Stefano Cusin a été confronté à un conflit entre une large majorité de joueurs, qui ont renoncé à participer au stage organisé en France, et la Fédération. Les insulaires ont certes dominé le Cap Vert (2-1, le 17 octobre), mais avant la réception de la Centrafrique et du Ghana, en novembre prochain, en qualifications pour la Coupe du Monde 2026, les crispations ne se sont pas totalement atténuées...
Par rapport à ce qu’il a vécu lors de certaines de ses précédentes expériences dans des pays aussi compliqués que l’Iran, la Libye et plus récemment le Soudan du Sud, Stefano Cusin (54 ans) pourrait comparer son bizutage aux Comores comme un aimable divertissement.
Quelques jours avant le regroupement à Mallemort, dans le sud de la France, et le match amical prévu face au Cap Vert le 17 octobre, l’Italien a appris, souvent indirectement, que de nombreux joueurs ne feront pas le voyage. « J’avais convoqué 19 joueurs. Seuls 3 sont venus : le gardien Adel Anzimati-Aboudou (US Quevilly Rouen, France, L2), le défenseur Glenn Younousse (Girondins de Bordeaux B, France, National 3) et le milieu Aymeric Ahmed (RE Virton, Belgique, Division 2). Dans l’urgence, avec le staff, nous avons appelé des garçons de 18, 19, 20 ans et un peu plus, évoluant en Europe. Nous avons réussi à monter un effectif, à travailler et à gagner ce match face à une équipe cap-verdienne qui a marqué au bout de deux ou trois minutes et qui imaginait peut-être que ce serait un match facile face à une équipe presque totalement remaniée », sourit Cusin.
Les tensions entre la fédération et une majorité d’internationaux a donc empêché le Transalpin de préparer idéalement les deux matches des 16 et 21 novembre à Moroni face à la Centrafrique et au Ghana. « J’ai appelé des joueurs qui avaient décidé de ne pas venir à Mallemort. Il y a un problème entre eux et la fédération, les deux parties doivent discuter. Moi, je suis là pour m’occuper du volet sportif, et je pense que beaucoup d’entre eux seront là dans trois semaines. »
Saïd Ali Athouman, le président de la fédération des Comores, espère aussi que les choses s’apaiseront rapidement, même s’il entend rester ferme sur ses positions. « Les joueurs ont envoyé un communiqué avant le regroupement d’octobre, mais j’avoue que je n’ai pas tout compris à leurs revendications. Il faut qu’ils soient conscients de quelque chose : on peut discuter des conditions de voyage, d’hébergement, de primes… Beaucoup de choses ont été améliorées dans ces domaines ces derniers temps. Les Comores sont un petit pays, et je suis conscient que nous pouvons encore nous améliorer. Mais je ne vois pas pourquoi, dans ce communiqué, ils viennent parler de football féminin ou de l’équipementier », explique le dirigeant.
Le président de l’instance, lors d’une discussion avec le capitaine des Comores El Fardou ben Mohamed (APOEL Nicosie, Chypre), a rappelé au joueur qu’il était prêt à discuter de tout, sauf des sujets « ne concernant pas les joueurs. Il y a dans cette sélection des footballeurs qui pensent parler au nom du groupe. Certains de ceux qui n’étaient pas en France m’ont dit qu’ils avaient refusé de venir par solidarité. La sélection n’appartient à personne. Je pense que des joueurs n’ont pas forcément admis que la Fédération décide de changer de sélectionneur (Younes Zerdouk a été remplacé par Cusin au mois de septembre, ndlr). Ils peuvent ne pas être d’accord, mais ce qui compte, c’est l’équipe nationale. Et puis, c’est un choix qui a été fait par la fédération, ils doivent l’accepter. On va discuter avant les deux matches de novembre, mais les joueurs ne doivent pas s’occuper de ce qui relève de la fédération. »
A environ trois semaines des prochaines échéances des Cœlacanthes, une des principales interrogations concerne la présence des joueurs initialement convoqués par Cusin pour le stage et le match amical en France. « Le coach fera ses choix. Et si des joueurs ne veulent pas venir, on ne peut pas les forcer », poursuit Saïd Ali Athouman, qui dit avoir « apprécié » l’attitude du sélectionneur face aux évènements.
« Il ne s’est pas du tout affolé, il est resté serein, très concentré sur son travail, en cherchant des solutions pour remplacer ceux qui n'étaient pas là. Je pense que le fait qu'il soit européen, et donc étranger à ce qui concerne les questions entre les joueurs et la fédération, l’a aidé. Et en plus, j’ai vraiment trouvé que la sélection, bien que privée de nombreux titulaires, avait fait un très bon match face à un adversaire qualifié pour la prochaine CAN… »
Alexis Billebault