Considérée comme étant la meilleure femme arbitre de la RDC, Carine Ayom est enthousiasmée par l'évolution de l'arbitrage féminin dans le football mondial avec notamment la présence pour la première fois des femmes au mondial masculin. Dans un entretien accordé à Sport News Africa, la Congolaise a affirmé rêver désormais plus grand; déjà désignée pour arbitrer des grands derbys en ligue 1 congolaise, Carine Ayom est motivée à multiplier des efforts pour officier un jour dans des grandes compétitions internationales masculines à l’instar de la Rwandaise Salima Mukasanga.
Carine Ayom, pour la première fois de l’histoire les arbitres féminins sont présentes dans une coupe du monde masculine, qu'est-ce que ça vous fait de voir ça?
Carine Ayom : Je suis très contente, c'est vraiment une source de motivation pour moi. Cela prouve qu'il y a une grande évolution de l'arbitrage féminin. Notre travail est valorisé par le la FIFA et je suis très heureuse.
Parmi les trois premières femmes pionnières, il y a une africaine, la Rwandaise Salima Mukasanga qui était déjà la première femme à officier dans une CAN masculine. Le fait qu'il y ait une africaine parmi les trois vous donne-t-il encore plus d'espoir pour l'avenir ?
Carine Ayom : Oui, beaucoup d'espoir. Quand je l'ai vue pour la première fois dans ce Mondial comme quatrième arbitre, je me suis dit que moi aussi je peux atteindre ce niveau là avec l'aide de Dieu et beaucoup de travail. Mon objectif est d'officier dans des grandes compétions internationales masculines comme Salima. Elle est un bon exemple pour toutes les femmes arbitres africaines. J’aimerai, moi aussi, officier à la Coupe du monde un jour.
Avez-vous déjà rencontré Salima Mukasanga?
Oui, je l'ai rencontrée au Cameroun lors de la dernière CAN. J'y étais pour arbitrer le match des barrages des éliminatoires de la Coupe du monde U20 féminine 2022 entre le Cameroun et le Nigeria.
Avez-vous pu échanger ?
Oui, nous avions pu échanger car nous étions logées dans un même hôtel. Elle m'a dit que c'est n'est pas sorcier d'atteindre son niveau. Il faut juste avoir de la discipline et aimer son travail, rien de plus. J'ai bien retenu ses conseils et je vais beaucoup travailler pour atteindre son niveau, j'y crois.
Vous êtes très réputée en RDC au point d'être désignée pour diriger des grands derbys de Kinshasa entre DCMP et V.Club. Comment vous sentez-vous quand vous arbitrez ce genre de rendez-vous ?
Quand j'arbitre un match des hommes, j'oublie que je suis une femme. Quand les hommes voient une femme au sifflet de leur match, ils ont tendance à essayer de l'intimider mais moi quand je monte sur le terrain, je me mets dans la peau de la maitresse du terrain et je ne me laisse pas intimider, cela m'aide à les maîtriser tous.
Aujourd'hui vous avez gagné en respect auprès des athlètes et dirigeants, qu'est-ce que ça représente pour vous ?
C'est une fierté pour moi, c'est d'ailleurs grâce à ça que je me dis qu'un jour je peux atteindre le niveau de Salima Mukasanga. Déjà le fait d'arbitrer un grand derby entre DCMP et V.Club, c'est quelque chose de grand pour moi car cela demande d'avoir un mental très fort parce que vous voyez toutes les stars du football du pays, il faut avoir les nerfs solides pour les maîtriser tous. Quand j'arbitre un derby des hommes, je me vois comme Stéphanie Frappart, la Française qui est aussi au mondial. Elle s'est imposée dans la Ligue 1 française et moi aussi je suis décidée à continuer à m'imposer au niveau de la Ligue 1 congolaise.
Qu'est-ce que vous avez fait pour gagner en crédibilité ?
Je me suis imposée une discipline personnelle pour ne pas me laisser manipuler par les hommes.
Le travail d'arbitre est-il difficile pour les femmes, surtout quand il faut officier un match des hommes ?
Franchement, ce n'est pas facile pour une femme d'être arbitre, il y a plusieurs choses qui peuvent vous arriver sur et en dehors du terrain qui, si vous n'avez pas des nerfs solides, vous risquez d'abandonner. Mais on tient le coup, je sais ce que je veux et je continue.
Quelles sont ces difficultés que vous rencontrez en tant que femme arbitre?
Dans un milieu dominé par les hommes, c'est compliqué quand vous êtes femme. Déjà concernant la désignation des matches. On privilégie les hommes parce ce qu'on n'a pas trop confiance aux femmes. C'est donc une sorte de discrimination dont sont victimes les femmes arbitres surtout pour les derbys mais il y a quand-même une amélioration parce que moi par exemple j'ai déjà été désignée pour diriger les grands derbies de Kinshasa.
Qu'est-ce qui vous a poussé à embrasser la carrière d'arbitre ?
C'est une passion pour moi. Déjà à l'université j'ai fait les sciences sportives et ça m'a aidé à devenir arbitre. Je suis arbitre depuis 2016 et devenue arbitre internationale depuis 2018.
Carine Ayom, quel est le grand match que vous avez arbitré au niveau continental?
C'est le match Cameroun - Nigeria, barrages des éliminatoires du mondial U20 dames 2022, un match à grande intensité et je suis décidée à aller plus loin.
Jonathan MASIALA