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Mali : soupçons de favoritisme et détournement de fonds à la Femafoot

Au Mali, 5 ligues dénoncent, dans un courrier adressé à la FIFA et au président de la transition, dont Sport News Africa a pu prendre connaissance, « l’ingérence » et « la gestion financière » du comité exécutif de la Fédération malienne de football. Elles sollicitent l’implication des deux institutions afin d’éviter une nouvelle crise et pointent du doigt l'existence d'un compte bancaire non déclaré sur lequel transiterait des dotations de la FIFA.

De notre correspondant au Mali,

Le collectif des ligues majoritaires de la Fédération malienne de football.

A un an et deux mois de la fin du mandat de l’actuel bureau, élu le 29 aout 2019, le football malien se dirige-t-il vers une nouvelle crise ? Rappelant les énormes sacrifices ayant abouti à l’élection de l’actuelle équipe dirigeante du football malien, cinq des neuf ligues régionales ont saisi le président de la Transition, le Colonel Assimi Goïta et la secrétaire générale de la FIFA, Fatma Samoura, sur la situation qui prévaut à la Femafoot. Elles dénoncent notamment « l’ingérence » du Comité exécutif dans leurs affaires intérieures sur fond de tension et une « gestion financière calamiteuse » des fonds alloués au football malien.

Les ligues dissidentes écartées par les textes ?

Dans la correspondance, les ligues régionales de football de Kayes, Koulikoro, Kidal, Ségou et Tombouctou attirent l’attention du président de la Transition sur la situation actuelle de la Fédération malienne de football. « Dès sa prise de fonction, le Comité exécutif s’est attelé à la recherche d’une majorité confortable pour asseoir son hégémonie sur le football malien, car, pour rappel, il avait été élu par seulement 51,67% des voix, après l’ingérence des politiques d’alors. Pour ce faire, il a procédé à la relecture des textes, en octobre 2021, avec comme objectif principal, la modification du quorum, qui passa ainsi de 62 membres à 84 », peut-on lire dans la correspondance.

En effet, quatre des cinq ligues concernées vont organiser des élections pour élire un nouveau bureau avant le renouvellement du bureau exécutif de la Femafoot. Lors de la dernière assemblée générale organisée le 19 mars 2022, des nouveaux textes ont été adoptés parmi lesquels celui du statut type des ligues. Dans un paragraphe de ce nouveau texte existe un article qui selon la Fédération frappe les leaders des cinq ligues. Il est notamment stipulé que : « Le président de la ligue régionale doit résider sur le territoire administratif de la région concernée pendant toute la durée de son mandat. Il est chargé d’assurer la continuité des services de la ligue régionale sous peine d’être révoqué par l’assemblée générale de la ligue. »

Les présidents des ligues concernées sont majoritairement fonctionnaires d’états. Ils sont installés la plus part du temps à Bamako dans leur lieu de service et se rendent dans leur région lors d’activités sportives. Statutairement (cf article 118) un délai d’un an est accordé aux ligues afin d’harmoniser leurs statuts avec ceux de la Femafoot. Mais, selon les cinq ligues, le Comité exécutif a fait voter ses statuts types des ligues avec une majorité mécanique, dans le but d’exclure certains responsables de ligues et clubs qui ne réclament que la transparence.

« Des fonds de la Femafoot sont gaspillés, déficit d'1,3 milliard »

Soulignant que cinq litiges sont pendants devant le Tribunal Arbitral du Sport (TAS), pour un coût de plus de 80 millions FCFA, les cinq ligues fustigent la gestion financière de la Fédération malienne de football. « Elle est seulement calamiteuse, les budgets sont souvent adoptés, après exécution, et les comptes n’ont jamais été certifiés par les auditeurs externes (...) Dans le même ordre d’idée, les fonds générés par nos compétitions, les contributions de nos sponsors, les subventions de la FIFA et de la CAF, les droits perçus dans le cadre de la redevance média, les cachets des matches amicaux sont simplement dilapidés et ne servent pas le football », ont-elles révélé. Avant de poursuivre : « Les rapports financiers 2020-2021 dégagent un déficit de 1,03 milliard de francs CFA, pour un seul exercice. Pour le budget 2021-2022, en cours d’exécution, de près de 5 milliards FCFA, la part des ligues et clubs est à moins 100 millions de francs CFA. Les ligues régionales ne perçoivent que 3 millions de francs CFA par an pour l’organisation de leurs différentes compétitions. Cette subvention est payée de manière discriminatoire, selon que vous soyez parmi les ligues favorables ou opposées à leurs pratiques. Pendant ce temps, les membres du Comité exécutif de la Femafoot s’octroient 16 millions de francs CFA par mois comme salaire et autres primes. »

Un audit financier demandé, un préjudice estimé à 428 millions de francs CFA

Signalant l’existence de deux comptes bancaires spéciaux pour les fonds alloués par la FIFA, contrairement aux dispositions réglementaires en la matière, elles soutiennent que des fonds destinés à la Femafoot ont transité par ce second compte sans être indiqués dans les états financiers de l'instance, avec un préjudice estimé autour de 428 369 660 de francs CFA.

Ainsi, pour faire l’économie d’une nouvelle crise dans le football malien, elles sollicitent l’implication du chef de l’Etat et de la FIFA en vue d’exiger de la Femafoot l’audit financier et judiciaire des comptes de la Fédération, l’ouverture d’une enquête sur le mode de gouvernance instauré au niveau de la Femafoot, le retrait des statuts types qui non seulement seraient adoptés en violation des textes, mais qui sont aussi source d’éventuels conflits, ainsi que la cessation immédiate de toutes formes d’ingérence du Comité exécutif dans les affaires internes de ses membres.

A en croire les auteurs de cette correspondance, qui affirment avoir déjà informé le Comité National Olympique et Sportif du Mali (CNOSM) et le département en charge des Sports de la situation, l’implication du président de la Transition permettra, à coup sûr, de circonscrire une crise de plus, qu’on veut imposer à des régions déjà meurtries par plusieurs années de crises sécuritaires.

Drissa NIONO

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