A la veille du quart de finale opposant le Maroc au Portugal, Abderrahim Taleb affiche sa confiance. Pour l'expérimenté technicien marocain, les Lions de l'Atlas ont toutes leurs chances face à l'armada portugaise et devront maintenir le système qui fait recette depuis le début du Mondial 2022.
De notre correspondant au Maroc,
Sport News Africa : Qu'est-ce qui vous a le plus impressionné dans l'équipe marocaine dans ce Mondial ?
Abderrahim Taleb : Ce qui m'a le plus impressionné reste le groupe. Il y a aussi la générosité dans les efforts. C'est une sorte de pâte à modeler dans les mains du coach Walid Regragui, qui peut l'utiliser avec n'importe quel système. Les joueurs suivent les consignes et il y a une très bonne complicité et une bonne relation entre eux. Cela les pousse à se donner à fond. Ceux qui jouent et ceux qui ne sont pas sur la pelouse forment une famille. C'est cela la force de l'équipe nationale marocaine. En outre, on n'a jamais vu un joueur en difficulté sur le terrain sans qu'il n'y ait un partenaire pour aider. Certes, il y a l'abnégation et de la force, mais derrière l'équipe, il y a aussi un patron qui fait passer le message. Il y a enfin une complicité entre le staff, le public et bien sûr l'équipe.
Comprenez-vous les critiques, notamment espagnoles, sur le jeu du Maroc ?
L'Espagne a le droit de critiquer, parce qu'elle a perdu le match. Le tiki taka a des limites, car il permet de jouer vertical mais jamais en profondeur. Le fait que l'équipe marocaine ait joué en 4-1-4-1 en bloquant le milieu de terrain a posé beaucoup de problèmes à Luis Enrique, un coach qui aime les espaces et jouer derrière les lignes défensives. Le Maroc l'a bien étudié et bien mis en place le système qui permet de le bloquer. L'Espagne n'a pas su trouver une faille. Au contraire, c'est le Maroc qui a pu gratter trois occasions de but sur des face-à-face. L'Espagne n'a jamais été en mesure de marquer, bien qu'elle ait varié le jeu de gauche à droite. Son jeu était inefficace, parce qu'il n'y avait aucune issue pour passer vue la forme de la défense marocaine et surtout avec la présence des trois milieux de terrain : Amallah, Ounahi et Amrabat. Ces trois ont muselé le milieu de terrain espagnol, ce qui a motivé les Marocains et leur a donné de la confiance pour gérer les 120 minutes. On a vu une équipe qui a eu plus de cœur et d'âme sur le terrain : c'était le Maroc.
Vous vous attendez au même type de prestation face au Portugal ou le Maroc devra-t-il tenter un peu plus en attaque ?
Ce sera un autre type de match. Le Portugal n'est ni la Belgique ni la Croatie ni l'Espagne encore moins le Canada. Il a de bons joueurs pétris de qualités techniques qui jouent aussi de façon latérale et en fonction de l'adversaire. Je pense que Regragui ne va jamais s'éloigner de sa devise : assurer une bonne défense devant Bounou et jouer les contres en profitant de la technicité et de la vitesse de ses attaquants. Je ne pense pas qu'il y aura un changement de système, mais ce sera un match difficile. On va jouer sur les fautes de l'adversaire qui tentera de marquer. Et c'est là la force du Maroc qui va tenter de contrer et d’inscrire un but décisif. Je suis pour le même système, parce qu'on ne peut pas changer un système ni les joueurs qui font gagner. Donc on commencera certainement avec le même effectif, sauf s'il y a bien sûr des blessés. Et s'il y'en a, d'autres joueurs de qualité sont sur le banc.
Quelle sera la principale clé marocaine face au Portugal ?
Je crois que la principale clé contre le Portugal sera de les mettre en doute au début, durant les quinze premières minutes. Si on gère les premières minutes aisément, tactiquement et sur le plan mental, cela pourra faire douter le Portugal. A partir de là, le Maroc pourra assommer l'adversaire. Je connais bien Regragui- un ami intime avec qui j'ai fait la licence CAF Pro dernièrement-, je connais son système... D'ailleurs Roberto Martinez et Luis Enrique nous ont donné durant des cours leurs manières de jouer et de gérer les équipes. Donc je pense qu'on aura une chance, car il y a une équipe professionnelle avec des joueurs qui évoluent à l'étranger. On n'a pas peur, on est confiants. Il faudra bloquer les Portugais pour qu'ils ne construisent pas à partir de leur défense.
Ne craignez-vous pas que les Marocains paient physiquement les 30 minutes supplémentaires face aux Espagnols ?
Je ne pense pas que le Maroc aura des problèmes sur le plan physique, car avec les moyens modernes de récupération, quatre jours sont suffisants. En plus, il y a la volonté de jouer qui est une arme pour aider les joueurs. Le seul problème sera les blessures et là il y a des joueurs capables de les remplacer. Si on est plus motivés, on a tout pour gagner. Je pense que le Maroc sera présent physiquement, tactiquement et techniquement pour gagner.
Les joueurs ont reçu les félicitations du Roi du Maroc. Quel impact cela peut-il avoir ?
Je crois que l'apport psychologique du Roi va donner des ailes aux joueurs. J'étais au Wydad quand nous avons gagné la Coupe d'Afrique (des clubs) en 1992-93 au Soudan. Et je me souviens : quand le Roi nous a appelés au téléphone, cela nous a donné des ailes. Donc je pense que les joueurs vont encore donner le maximum sur le terrain. Et aujourd'hui, quelle que soit l'issue de ce match, nous allons fêter ces gladiateurs, ces guerriers qui nous ont donné la joie qu'on attendait depuis fort longtemps.
Mohamed HADJI