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Mondiaux d’Oregon 2022 : Louahala décortique la finale du 800m et évoque l’athlétisme algérien

L’Algérie a remporté sa première médaille aux Championnats du monde d’athlétisme 2022, ce samedi 23 juillet, à Eugene, aux États-Unis. Djamel Sedjati a remporté la médaille d’argent sur 800 mètres. Dans un entretien accordé à Sport News Africa, l’ancien champion algérien, Malik Louahala, qui occupe le poste de secrétaire général de la commission des athlètes du Comité Olympique algérien, a analysé la finale du 800 mètres.
De notre correspondant en Algérie,

Finale du 800m aux Mondiaux d'athlétisme 2022

Sport News Africa : Après une longue absence, l’Algérie décroche une nouvelle médaille aux Mondiaux d'athlétisme, cet été, à Eugene aux Etats-Unis. Djamel Sedjati a fini deuxième au 800m. Comment jugez-vous sa performance en finale ?

Malik Louahala : Sa performance est tout simplement extraordinaire. C’est pratiquement la première saison de Djamel Sedjati à haut niveau sur 800m. Il a choisi cette catégorie l’année dernière mais il n’a pas pu s’exprimer. Il s’est qualifié aux Jeux olympiques d'été de 2020 à Tokyo mais il n’a pas pu prendre part à la compétition car il a été testé positif au covid-19. L’année 2021 fut pratiquement une année blanche pour l’athlète. C’était très difficile.

Il commence donc à s’exprimer en 2022. Depuis le début de l’année, il n’a pas beaucoup couru également. Il progresse de façon exponentielle de course en course. C’est un exploit qu’il ait gagné cette médaille d’argent et ça augure de bonnes choses pour l’avenir.

Djamel Sedjati 800m Algérie
Djamel Sedjati 800m Algérie

Son retour impressionnant lors des 200 derniers mètres lui a permis de monter sur le podium. Pouvez-vous nous parler de sa tactique ?

Djamel Sedjati est coaché par un très grand entraineur algérien, Amar Benida, qui a déjà eu sous ses ordres des champions olympiques. Il a entrainé Nouria Mérah-Benida lors de sa victoire au 1 500 mètres aux Jeux olympiques de 2000. Il a donc logiquement eu une tactique très réfléchie. Lors des premiers 400 mètres, il a su préservé son énergie. Il a été patient et il a attendu son heure.

Djamel Sedjati a laissé les autres concurrents faire la course devant lui. Et l’une de ses qualités et d’avoir une grosse prise vers la fin. Il a pu décrocher lors des 150 derniers mètres avec un gros sprinte et il a réussi à passer la ligne d’arrivée en deuxième position. C’est vraiment une tactique judicieuse dans une finale ouverte. Les huit concurrents pouvaient gagner. C’était à celui qui avait la tactique la plus juste.

L’autre algérien de la course, Slimane Moula, a fini à la cinquième position. Il prend la tête de la course après les 200 premiers mètres avant de laisser la place au Canadien Marco Arop. Il n’a malheureusement pas réussi à tenir le rythme à la fin. Qu’aurait-il dû faire pour monter sur le podium ?

Tous les autres athlètes de cette finale avaient peur de lui parce qu’il arrive à mettre une grosse accélération lors du dernier 100 mètre. À la différence en finale, il n’a pas eu la fraicheur voulue pour faire son accélération. Il faut rappeler que lors des deux séries et des demi-finales, il a fait des temps nettement plus rapides que ses concurrents.

Il a couru le premier tour à 1 :44.90, la demi-finale à 1 :44.89. On peut comparer ces résultats à ceux du nouveau champion du monde Emmanuel Korir (séries : 1:49.05, demi-finale : 1:45.38). Ce dernier a pu donc s’économiser lors des deux précédents tours contrairement à Slimane Moula. L’athlète algérien s’est grillé lors des deux premières courses. On s’entait en finale qu’il n’avait pas l’énergie nécessaire pour place son accélération lors du dernier 50 mètres.

Slimane Moula
Slimane Moula Algérie 800m

Slimane Moula s’est propulsé dans la dernière phase pour gagner sa course des séries et celle des demi-finales, simultanément, devant lui ses adversaires perdaient du terrain. Pourquoi n’a-t-il pas appliqué cette même stratégie selon vous ?

En fait, ce n’est pas lui qui a changé de stratégie. Ce sont plutôt c’est adversaires. On le sait désormais. À la fin de la course finale, il y a le Canadien Marco Arop qui a clairement dit que sa stratégie a été mise en place pour contrer Slimani Moula.

Les coureurs savaient très bien que s’ils avaient eu avec eux Slimane Moula lors de la dernière partie de la course, ils n’auraient aucune chance. À partir du dernier 300 mètres, ils ont fait un gros changement de rythme et ils ont emballé la course. Cela a emballé la course de Slimane Moula qui ne pouvait plus accélérer durant les derniers 50 mètres. C’est sa principale qualité.

Le groupe et le Canadien spécialement a fait accélérer la course et cela a empêché Slimane Moula d’être dans le groupe leader et placer son accélération. On a très bien vu qu’il était fatigué à la fin.

Les coureurs du groupe de tête ont attendu jusqu’à 200 derniers mètres avant d’attaquer, en compagnie de Djamel Sedjati. Pensez-vous que nos coureurs ont mis en place une tactique commune comme c’est le cas des Kenyans ?

Si vous regardez bien la course, les Kenyans n’ont pas fait stratégie commune. Chacun a couru pour lui-même. S’il y avait eu stratégie commune, il y aurait une au moins un Kenyan qui aurait mené.

Au début de la course, Slimane Moula a mené puis ce fut le tour du Canadien qui a changé de rythme lors du dernier 300 mètres. Ça veut dire que les Kenyans n’ont pas eu à faire stratégie commune.

Nous avons désormais deux chances de médailles en demi-fond. Pensez-vous que l’un des deux athlètes ; Djamel Sedjati et Slimane Moula, doit laisser la place à l’autre au 800m et essayer d’avoir une médaille dans le 1500m ?

Il n’y a pas que ces deux athlètes. Il y a aussi le vice-champion du monde junior Mohamed-Ali Gouaned qui a couru cette année à 1 :43.60. Ce qui est une excellente performance. Il ne pouvait pas être présent aux Championnats du Monde 2022 car l’Algérie ne pouvait pas enregistrer plus de deux athlètes. Dans les prochaines années, nous aurons trois coureurs de haut niveau ; Djamel Sedjati, Slimane Moula et Mohamed-Ali Gouaned.

Concernant votre question, je ne pense pas que les trois iront vers le 1 500 mètres parce qu’à la base ce sont des athlètes qui viennent du 400 mètres. Ils sont déjà montés. Ces des coureurs rapides. On va les retrouver que sur 800 mètres.

Plus généralement, l’athlétisme algérien commence à reprendre des couleurs avec la montée en puissance de jeunes coureurs. Comment jugez-vous le niveau des athlètes algériens ?

Le niveau actuel des athlètes est très appréciable. Cependant, ils sont passés par une période très difficile surtout par rapport aux deux années de covid-19. Il y a eu beaucoup de sacrifices de leurs parts et des encadrements et entraineurs. Franchement, il faut leur tirer chapeau.

Nous avons eu une grosse performance à travers l’athlète Amine Bouanani sur 110 mètres haies qui a couru une historique demi-finale. Jamais un athlète algérien n’a peu accédé à ce stade avec un nouveau record d’Algérie. Il y a aussi Lahoulou Abdelmalik sur 400 mètres haies.

Nous avons, toutefois, quelques défaillances dans le demi-fond en général sur le 1 500 mètres et le 5 000 mètres. Nous n’avons plus d’athlètes dans cette catégorie. Il faut qu’il y ait une stratégie dans ce sens. On se réjouit d’avoir un groupe de jeunes athlètes. Il faut penser aussi à une stratégie de développement, c’est le plus important.

Pouvons-nous espérer une médaille en athlétisme aux Jeux Olympiques de Paris ?

Il faut travailler et avoir une bonne stratégie. Avec les athlètes du 800 mètres, on peut être normalement sur le podium des JO de Paris 2024.

Il faut rappeler que les trois athlètes sont très jeunes. Mohamed-Ali Gouaned a 20 ans, Djamel Sedjati et Slimane Moula ont 23 ans. À Paris, ils seront vraiment à maturité. Ça va se jouer principalement sur 800 mètres. Dans les autres épreuves, ce sera difficile.

Il est utile de rappeler l’absence de Triki Yasser sur triple saut, aux Mondiaux 2022, qui avait fait cinquième lors des derniers Jeux Olympiques. Il a ressenti une douleur juste avant la compétition. Ce sera un athlète avec qui il faudra compter à Paris.

Un dernier mot…

Il faut franchement remercier les entraineurs qui ont fait un très gros travail avec les athlètes. Ne pas oublier leurs parts dans les exploits des sportifs.

Touabi Juba Arris

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