Pour certains, l’Académie Alima va contribuer à la formation d’une élite footballistique solide et compétitive au Congo-Brazzaville. Les autres redoutent au contraire, que l’académie de football ne soit qu’un vœu pieux. Comme de nombreuses autres structures similaires ayant déjà vu le jour au pays.
De notre correspondant au Congo
Célèbre grâce à son club multidisciplinaire AS Otoho et pour son enfilade d’infrastructures de pointe (hôpital moderne, hôtels 5 étoiles, etc.), Oyo, petite localité du nord du Congo-Brazzaville accueillera bientôt un centre de formation de football. Un accord relatif a été conclu le 12 février dernier à Brazzaville entre le ministre congolais des Sports Hugues Ngouelondelé et l’ancien international français, Blaise Matuidi qui exécutera ce projet.
Proposée à l’ancien milieu de terrain du PSG par Nanga Ibata, un Congolais basé à Miami aux États-Unis d’Amérique, c’est une école de football qui sortira des terres d’Oyo, mieux émergera des eaux de la rivière Alima, cet affluent du majestueux fleuve Congo qui arrose la ville natale de l’actuel Président de la République Denis Sassou-Nguesso. D’où sa dénomination « Académie Alima ».
Il s’agira principalement de détecter et former de jeunes Congolais de 12 à 14 ans en leur administrant non seulement une formation footballistique, mais aussi en leur assurant avec l’aide des établissements d’excellence comme le lycée d’excellence d’Oyo, une éducation scolaire classique à l’effet d’en faire de véritables citoyens épanouis et impliqués dans le développement du pays.
Dans un pays qui peine à se frayer une place de choix sur l’échiquier international en matière de football (112e place au classement FIFA, novembre 2023), l’initiative est trop belle pour faire rêver des Congolais assoiffés de football « croustillant » et d’une jeunesse « en plein essor ».
« Aujourd’hui, la jeunesse congolaise est synonyme d’incivisme, de désœuvrement et de banditisme. Or, cette année a été déclarée année de la jeunesse par le Chef de l’État. Donc, un tel projet ne peut qu’être le bienvenu. C’est vrai que ce n’est pas une panacée, mais « le plus long chemin commence par le premier pas, dit l’adage », se félicite Donald Moutsinga, supporter de l’AC Léopards, leader de Ligue 1.
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Or, au-delà de ces beaux rêves, l’Académie Alima n’est pas sans rappeler la signature d’un accord quasiment similaire d’il y a près de deux ans. En octobre 2022, le ministre congolais des Sports Hugues Ngouelondelé signait, avec l’Académie Campus Basile Boli (Campus ABB) de Basile Boli, un autre ancien international français, un accord pour la mise en œuvre d'un projet de formation destiné aux jeunes footballeurs dont l'âge varie de 14 à 18 ans. « Je suis venu voir comment on peut amener les entraîneurs dans les prochains jours à Brazzaville à détecter pour faire du sport-études. Il s'agit de suivre les jeunes de 14 ans à 18 ans après un dépistage », promettait l’ancien défenseur central de l’Olympique de Marseille. Mais deux ans après, plus personne ne parle du projet avec Campus ABB. Comme si l’initiative était déjà enterrée dans les tiroirs des bureaux du ministère des Sports au point d’être oubliée de tous !
D’où des réserves d’observateurs sur la spécificité, mieux encore la valeur ajoutée d’Académie Alima. « C’est avec beaucoup de satisfaction que j’ai suivi l’information dans les médias. Tant il va contribuer à guérir les maux dont souffre notre football. Mais quid du projet avec Basile Boli ? », s’interroge Ndoumbe-Makaya, instructeur et coach ayant managé plusieurs clubs d’élite basés à Pointe-Noire.
Pour Pépin Ekouakoubou, journaliste à Radio Pointe-Noire, un organe public, il serait question pour les autorités de « renforcer les capacités opérationnelles » du Centre National de Formation de Football (CNFF). La structure a formé de jeunes talents, dont les champions d'Afrique juniors en 2007, mais est aujourd'hui presque à l'arrêt. « L’avantage du CNFF est avant tout géographique, car il est basé à Brazzaville, donc au centre. Les moyens et l’énergie qu’on va mettre dans l’Académie Alima pouvaient être déployés dans la réhabilitation et le renforcement des capacités opérationnelles du CNFF », propose Ekouakoubou.
D’où ce vœu de Ndoumbe-Makaya : « créer des centres, c’est bien. Mais soyons réalistes et pragmatiques. Rentabilisons d’abord l’existant ».
John Ndinga Ngoma