Aboubacar Sidiki Camara plus connu sous le surnom ‘’Titi’’ est un ancien attaquant international guinéen. Il a évolué en France et en Angleterre dans les années 90. Joueur au physique imposant mais doté d’une pointe de vitesse hors du commun, Titi était aussi un amoureux de son pays pour lequel il était prêt à tout.
De notre correspondant en Guinée
Quand on évoque les légendes du football africain, il est difficile de ne pas citer «Titi». Aboubacar Camara de son vrai nom a marqué son temps. Cet avant-centre guinéen très rapide, puissant et doté d’une bonne technique malgré son physique, a durant sa riche carrière marqué de nombreux buts dont certains sont restés dans les mémoires.
Natif de Conakry en 1972, Titi Camara aura fait les beaux jours de l’AS Kaloum avant de rejoindre l’Europe en 1987 pour suivre un cursus sport-études à Amber FCUS dans le Puy de Dôme (France). De là, il rejoint l’AS Saint-Etienne où il signe son premier contrat professionnel. Il passe cinq saisons chez les Verts, inscrivant 16 buts en 94 matchs. Ses prestations attirent Lens qui est à l’époque plus coté que l’ASSE.
En 1995, il s’engage ainsi avec le Racing Club de Lens. Sous les couleurs Sang et Or, Titi Camara réalise des prouesses au point de devenir une valeur sûre de la Ligue 1 française. Grâce à ses performances, il ne s’éternise pas dans le nord. Après deux saisons seulement, il traverse toute la France pour venir poser ses valises dans le sud.
Nous oublierons jamais les larmes de TITI, joyeux anniversaire à @TitiCamara22 l’idole de @spqr13500 pic.twitter.com/QesO7zS2h2
— Fabrolszewski (@fabrodu13) November 17, 2021
L’Olympique de Marseille qui essaie de se refaire une santé après l’affaire OM-VA et la relégation, est à la recherche de pointures pour le front de son attaque. Le club français jette ainsi son dévolu sur le Guinéen. Après des débuts un peu difficile, Titi s’affirme finalement et le stade Vélodrome finit par l’adopter. Le déclic a lieu face à Bastia le 25 septembre 1998. Muet devant les buts depuis son arrivée sur la Canebière, Titi Camara contribue à la victoire des siens (2-0) en inscrivant un but. Il ne peut cacher son émotion. Il craque et verse de chaudes larmes.
«C’est difficile à expliquer. Quand tu es un compétiteur ce n’est pas facile. Il y a beaucoup de choses extra sportives qui se sont produites. Ce jour-là, on jouait contre Bastia et le coach m’a aligné. Je me suis raté deux fois. Ce n’était pas totalement de la maladresse parce que devant il y avait Eric Durand l’un des meilleurs gardiens du championnat à cette époque. Et comme je ne voulais pas rester sur ces deux échecs, j’ai persévéré et la chance m’a souri. Quand Robert Pirès m’a donné le ballon sans contrôler, j’ai tiré et c’est allé au fond des filets. C’est comme si une glace se brisait. J’avais en effet accumulé beaucoup de frustration. Ça m'a tellement affecté que voilà, quand j'ai fini par marquer, j'ai craqué sous le coup de l'émotion» ressasse l’ancien goleador.
Titi Camara participe à de nombreuses campagnes nationales et européennes avec Marseille. Mais malheureusement, il ne parvient pas à remporter un titre majeur avec les Phocéens. En témoigne le championnat perdu à la dernière journée de la saison 1998-99 au profit de Bordeaux, tombeur du PSG lors de l’ultime journée. «On arrive à la dernière journée, on fait le job et de l’autre côté on sait que Bordeaux affronte le PSG. Grand rival de l’OM, on sait qu’ils ont levé un peu le pied pour ne pas nous voir champion. C’est mon compatriote Pascal Feindouno qui inscrit d’ailleurs le but du titre pour les Girondins. J’étais déçu mais un peu soulagé que ce soit un Guinéen qui leur offre le titre» se remémore-t-il.
La même saison, les Phocéens vont perdre également en finale de la Coupe UEFA face à Parme (3-0) Joueur très apprécié, il laissera de bons souvenirs dans les différents clubs français où il a évolué.
It’s Titi Camara’s birthday today. You remember him.
Right foot like a traction engine.pic.twitter.com/2cPdV1O2Lb
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Après ces deux échecs frustrants avec Marseille en 1999, le Guinéen va encore franchir un palier à la fin de la saison. Il quitte Marseille pour le mythique club anglais, Liverpool. Comme à l'OM, Titi Camara va également verser de chaudes larmes sur les pelouses anglaises. Le 27 octobre 1999, les Reds font face à West Ham et le Guinéen marque l’unique but de la rencontre, idéalement servi par le tout jeune Steven Gerrard. Après le but, il fond en larmes. «Ce ne sont toutefois pas les mêmes larmes qu’à Bastia. Juste avant le match, on était en mise au vert. J'étais avec Gérard Houllier, et ma maman téléphone pour m'apprendre le décès de mon père. Mais j'ai dit ‘’Voilà, je vais jouer’’. J’ai joué pour honorer sa mémoire» se souvient le goleador.
L’idylle entre Liverpool et Titi n’aura cependant duré qu’une saison. Il marque 10 buts en 37 matchs avec les Reds. Cela suffit pour qu’un sondage réalisé sur le site du club, l’intègre dans le top 100 des joueurs qui ont marqué le Kop d’Anfield.
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Titi Camara, c’est aussi et surtout un amour fou pour sa sélection, la Guinée. Il était prêt à tout donner pour son pays. Malgré les tracasseries, il répondait toujours présent aux différentes convocations du Sily. Sa passion pour sa patrie a impacté sur sa carrière en club, notamment à Liverpool où les dirigeants étaient réticents à le libérer pour qu’il puisse aller défendre les couleurs de la Guinée. Titi Camara ira plusieurs fois à l’encontre des décisions de ses dirigeants. En témoigne sa brouille avec le technicien français Gérard Houllier, entraîneur des Reds à l’époque.
«Je suis venu jouer un match avec la sélection dans le cadre des éliminatoires de la Coupe du monde 2002 contre le Sénégal» raconte-t-il. Gerard Houllier ne voulait pas que je vienne parce qu’on avait un match important à jouer contre Everton (derby de la Mersey). Il s’était opposé mais je suis venu en sélection. A mon retour, il m’a manqué de respect en utilisant des mots blessants. Le club m’a sanctionné financièrement et durant 3 mois je m’entrainais seul. Il m’a ensuite demandé de faire des excuses publiques, ce que j’ai refusé. C’était une raison pour moi de quitter le club».
Pour la patrie aucun sacrifice n’est assez grand pour Aboubacar Titi Camara. Cette autre anecdote vient le prouver. «En 1991 lors de ma première sélection contre la Sierra Leone, on avait perdu 2-1 à domicile. Pour le retour, quand on arrive à Freetown la veille du match, il était 23h, ils nous servent à table. Ils nous ont servi de la nourriture dont la consommation est interdite pour un musulman. Pendant 1 heure, on est resté comme ça. Finalement on a mangé cette nourriture parce qu’on était laissé à nous-même. Le lendemain on a joué et on a gagné 1-0».
— Titi Camara (@TitiCamara22) June 8, 2020
Avec l’équipe nationale, Titi Camara aura marqué la bagatelle de 30 buts en 56 matches. Le géant a disputé 3 Coupes d’Afrique des Nations dont la dernière en Tunisie, en 2004. Durant cette compétition, Titi dont la sélection avait été critiquée plante 3 buts, notamment un face à la Tunisie. Un but qui va permettre à la Guinée de se qualifier pour les 1/ 4 de finale de la compétition. «Des gens ne voulaient pas me voir. Ils disaient que j’étais vieux. Que je ne devrais pas être là. Je me suis dit que le meilleur moyen, c’est de répondre sur le terrain. Avant le départ, j’avais déjà annoncé que ce sera mon dernier challenge avec le Syli. Durant le tournoi, je prouve que j’avais mérité ma place». Comme durant toute sa carrière, rien ne lui a été offert sur un plateau d’argent. Au moment de se replonger sur sa carrière, la grosse tache aura cependant été de n’avoir remporté qu’un seul trophée : une Coupe d’Arabie saoudite
Mamadou Gongoré DIALLO
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