Nous utilisons des cookies pour vous aider à naviguer efficacement et à exécuter certaines fonctionnalités. Vous trouverez des informations détaillées sur tous les cookies sous chaque catégorie de consentement ci-dessous.
Les cookies qui sont catégorisés comme « nécessaires » sont stockés sur votre navigateur car ils sont essentiels pour permettre les fonctionnalités de base du site. ...
Les cookies nécessaires sont cruciaux pour les fonctions de base du site Web et celui-ci ne fonctionnera pas comme prévu sans eux. Ces cookies ne stockent aucune donnée personnellement identifiable.
Les cookies fonctionnels permettent d'exécuter certaines fonctionnalités telles que le partage du contenu du site Web sur des plateformes de médias sociaux, la collecte de commentaires et d'autres fonctionnalités tierces.
Les cookies analytiques sont utilisés pour comprendre comment les visiteurs interagissent avec le site Web. Ces cookies aident à fournir des informations sur le nombre de visiteurs, le taux de rebond, la source de trafic, etc.
Les cookies de performance sont utilisés pour comprendre et analyser les indices de performance clés du site Web, ce qui permet de fournir une meilleure expérience utilisateur aux visiteurs.
Les cookies de publicité sont utilisés pour fournir aux visiteurs des publicités personnalisées basées sur les pages visitées précédemment et analyser l'efficacité de la campagne publicitaire.
Relativement peu médiatisé, le championnat burundais est devenu la cible de plusieurs réseaux de matchs truqués ces dernières années, notamment en provenance d’Afrique de l’Est. La FIFA et Interpol ont alerté la Fédération de football du Burundi qui travaille avec les autorités nationales pour tenter d’endiguer un fléau aux multiples ramifications.
En octobre dernier, l’IBIA (International Betting Integrity Association) annonçait avoir détecté cinq paris suspects entre juin et septembre 2024 pour des matchs de championnat au Burundi. Cet organisme qui répertorie les manipulations sur le marché des paris mondiaux ajoutait que de pareilles alertes n’avaient pas été enregistrées depuis 2020 au Burundi.
Ces avertissements rejoignaient ceux transmis par la FIFA à la Fédération de football du Burundi dans le courant de l’année sur de possibles truquages de matchs en première division. Mis au courant, le président de la FFB, Alexandre Muyenge, général de brigade de police dans le civil, alertait immédiatement les autorités nationales pour entreprendre un travail accru de vigilance.
Six joueurs et un coach emprisonnés
Selon l’ensemble des sources contactées par Sport News Africa, comprenant des entraîneurs, dirigeants, joueurs et observateurs, les matchs truqués se sont répandues comme un fléau habituel dans l’élite du championnat burundais. Une équipe attirait particulièrement l’attention : Deira Academy.
Le 30 octobre, par exemple, Deira recevait Lydia Ludic Burundi Academic, une des plus petites formations du championnat qui avait enregistré jusqu’ici 0 point en 6 journées (incluant une défaite 9-1 à Musongati).
A la stupeur générale, les visiteurs ouvraient rapidement le score avant d’être rejoints au score. En seconde période, au moment où les côtes grimpaient, le LLBA marquait un second but synonyme de première victoire de la saison et de gains importants pour les audacieux parieurs en direct.
D’autres rencontres alertèrent les autorités qui arrêtèrent peu avant la fin de l’année civile six joueurs (Masumbuko Jules, Ndayishimiye Gloire, Nzoyisaba Epimaque, Ntahoturi Hussein, Uwimana Morgan, Shabani Ramadhan) et l’entraîneur de Deira (Jaffar Djumapili). Emprisonnés un temps, ils furent relâchés depuis.
« Cette tricherie est sensible dans tous les clubs de Ligue A »
Conscient du fléau grandissant, la fédération organisa un atelier de sensibilisation le 8 janvier auprès des arbitres de première et seconde division notamment. Une initiative louable bien que certains pointaient un double standard avec la promotion, cinq jours plus tard, d’une société de paris sportifs (1XBet sur la page Facebook de la fédération).
Cependant, contrairement à l’immense majorité des fédérations sportives internationales ignorant ce sujet (ou amenuisant sa portée), le président de la FFB a pris ses responsabilités avec des mots forts : « Aucune équipe n’est épargnée par le trucage de matchs. Cette tricherie est sensible dans tous les clubs de Ligue A. »
Ne cachant pas le problème, Muyenge décrit une triste réalité qui a des ramifications régionales, continentales et même internationales. Le journaliste Gilbert Nkurunziza de Burundi-Eco rapportait mi-janvier des propos explicites tenus par le président : « Les personnes impliquées dans le trucage de matchs viennent de divers horizons : les Russes, les Belges, les Français, les Congolais, les Ougandais, etc. »
Particulièrement touché par le match-fixing, l’Ouganda est d’ailleurs le centre opérationnel d’un des réseaux manipulant les rencontres du championnat burundais. En novembre, la fédération ougandaise suspendait d’ailleurs 12 individus (9 arbitres, 2 dirigeants, 1 joueur) pour matchs truqués dans le championnat local avec l’ombre d’un syndicat criminel dirigé depuis l’Afrique du Sud.
« Les personnes impliquées : des Russes, Belges, Français, Congolais, Ougandais, etc. »
Selon les informations recueillies par Sport News Africa, plusieurs Ougandais avaient déjà implanté un premier réseau au Burundi ; certains étant arrêtés pour cela en marge des alertes internationales de 2020.
Bénéficiant de la précarité des joueurs locaux, certaines individus d’Afrique de l’Est (kényans et ougandais) ont servi de « fixer » pour des organisations continentales et même internationales. « Le Burundi a été un choix logique car c’est un championnat très peu médiatisé et sans grand recours économique », explique sous couvert d’anonymat un enquêteur détaché à une structure internationale surveillant les paris suspects. « Ces dernières années, les trucages en Afrique se sont déplacés et ont surtout concentré l’Afrique de l’est, notamment le Kenya et l’Ouganda. Par association, cela s’est déplacé au Burundi où les joueurs gagnent encore moins d’argent. Cela coûte très peu pour truquer un résultat. »
100 à 200 dollars par joueur pour truquer une rencontre parfois
Avec un salaire moyen d’environ une trentaine de dollars par mois, le Burundi est considéré comme l’un des pays avec les plus faibles ressources économiques au monde (87 % de sa population vit avec moins de 2 dollars par jour selon la Banque mondiale).
De fait, les émoluments gagnés par les footballeurs de première division sont très faibles, a fortiori pour des syndicats capables de débourser des centaines de milliers de dollars sur divers paris selon les rencontres (afin notamment de blanchir l’argent ou de générer un simple profit).
Selon les différentes sources interrogées, des sommes comprises entre « 100 et 200 dollars » sont parfois suffisantes pour corrompre un joueur. « Par rapport au niveau de vie ici, c’est six mois de tranquillité pour la famille », pointe l’un d’entre eux.
Si certains récupèrent plus d’argent, les montants ne dépassent jamais 1 000 dollars. Un investissement minime pour les commanditaires qui restent bien cachés dans l’anonymat d’une kyrielle d’intermédiaires et de réseaux différents. Pis encore, plusieurs burundais ont désormais remplacé des fixers d’Afrique de l’est et approchent désormais certaines familles, incluant des arbitres et entraîneurs.
L’aide d’Interpol
Une « maladie » comme le rappelait le président Muyenge que la fédération entend combattre. Un porte-parole a d’ailleurs expliqué à Sport News Africa les dessous des enquêtes. « Les informations ont été données par Interpol, et la fédération, en collaboration avec les autorités compétentes du pays, ont fait des investigations et ont pu identifier l’origine dans le cas de Deira.
La fédération a trouvé qu’il y a des gens qui paient certains membres des staffs des équipes, des joueurs ou même les dirigeants des clubs en leur recommandant des scores. Ces gens proviennent de différents pays […] C’est un grand réseau. Depuis la saison dernière, différentes sociétés de paris sportifs sont venues nous notifier sur ces cas. Par exemple, ils constataient l’ouverture de nouveaux comptes et ces gens-là misaient sur les mêmes matchs avec des scores exacts... »
Si les efforts de la FFB sont louables, ce « grand réseau » nécessitera l’appui de structures internationales, dont la FIFA, qui n’a pas répondu à nos questions et qui a été pointée du doigt récemment par des joueurs de l’équipe nationale d’Afghanistan pour son inaction quant aux matchs truqués impliquant des dirigeants de la fédération afghane. Un deux poids, deux mesures hélas coutumier et qui n’aidera pas le football burundais à éradiquer une maladie bien trop contagieuse.