Une ancienne dirigeante de la CAF a transmis un rapport privé corroborant les allégations contenues dans le dossier rédigé par Hannan Nur, la cheffe du département de la gouvernance, des risques et de la conformité, au sujet de Véron Mosengo-Omba, le secrétaire général de la CAF.
Révélé par Sport News Africa, le rapport de Hannan Nur avait causé beaucoup de remous à la CAF, notamment au sein du comité exécutif, très peu favorable au maintien en poste de Véron Mosengo-Omba.
Ardent défenseur de son secrétaire général, le président Patrice Motsepe avait pris les devants en annonçant que le dossier serait transmis à la commission d’audit et de gouvernance qui nommera un auditeur « indépendant ». Une décision contestée en interne à cause des accointances entre Mosengo-Omba et Dieudonné Happi, le vice-président de cette commission.
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Dans ce contexte tendu, un second rapport rédigé par une ancienne dirigeante de la CAF (Abiola Ijasanmi) confirma les allégations rédigées par Nur en allant même plus loin quant à la « culture toxique » inséminée au sein de la Confédération africaine de football.
« J’ai été victime de harcèlement et intimidation par le secrétaire général »
Précis, le rapport transmis à la commission d’audit et de gouvernance le 1er août pointe toute une série de dysfonctionnements divisés en quatre points clés : un cadre de travail malsain et dangereux, l’inefficacité du département des ressources humaines, de mauvaises pratiques de gouvernance et un abus de pouvoir et favoritisme du secrétaire général.
Partie en avril dernier, Ijasanmi dit avoir été « victime de harcèlement et intimidation par le secrétaire général pour forcer ma démission » au cours des huit/dix derniers mois de son engagement à la CAF.
D’autres qualificatifs sont attribués au management de Mosengo-Omba, notamment le « népotisme ». Pour appuyer ses dires, l’ancienne responsable des opérations à la CAF, donne l’exemple de sponsors concernés par « l’approche agressive » du secrétaire général.
Avec Orange, notamment, la relation s’est gravement détériorée avec un Véron déblatérant sur des pratiques « coloniales » tandis que la firme française, qui devait de l’argent à la CAF depuis 2019, rappelait qu’il était temps pour la Confédération africaine de football d’appliquer des réformes. Finalement, une équipe légale menée par Ijasanmi mettra simplement dix semaines début 2023 pour débloquer la situation et permettre à la CAF d’empocher les 19 millions de dollars dus par Orange. « Durant ce processus, le secrétaire général a tenté de faire dérailler les négociations à plusieurs reprises sans donner une raison claire », écrit-elle.
Les « intérêts personnels » du secrétaire général au détriment de l’institution
Si le rapport de Hannan Nur se focalisait principalement sur Sarah Mukuna, la directrice des associations membres nommée par Véron Mosengo-Omba sans l’approbation du comité exécutif, ce nouveau dossier se focalise principalement sur le secrétaire général et ses « intérêts personnels » au détriment de la bonne gouvernance de l’institution : « Des postes clés, comme la directrice des associations membres ou la responsable des ressources humaines, ont été attribués en fonction de la loyauté plus que sur la compétence. »
Plusieurs fédérations sont également citées comme bénéficiant de « favoritisme » et de passe-droit selon les accointances qu’elles entretiennent avec le secrétaire général ou les membres (nationalités) de son bureau. Ainsi, le Cap-Vert, le Ghana, la République démocratique du Congo ou le Togo se virent attribués des ballons ou des lots de matériels sans aucune transparence. Une « opacité » qui touche, selon le rapport, l’ensemble des décisions de la CAF, de l’engagement du personnel à la liste des invités pour les événements...
Conditions de sécurité non respectées
Au milieu de ces errances, symbolisées par un cadre de travail déplorable et inique où Véron Mosengo-Omba a obligé les contrats à dépendre du droit suisse – signifiant qu’en cas de litige, les employés du Caire doivent faire appel à d’onéreux avocats suisses ! -, les locaux de la CAF constituent aussi un problème global.
Sans équipement digne de ce nom, avec un mobilier et des ordinateurs passés d’âge, les employés se massent dans des bureaux irrespirables en été sans air conditionné ; contrairement au bureau du secrétaire général qui dispose d’une climatisation fonctionnelle. Pis encore, les conditions de sécurité ne sont même pas réunies et la catastrophe a été évitée de peu lorsqu’un début d’incendie s’est déclaré dans les offices du département légal en 2023.
Incapable de maintenir aux normes des sorties d’évacuation ou même d’avoir des extincteurs, le quartier-général de la CAF se distingue par une gestion déplorable où la responsable des ressources humaines, Reem Adel, « a divisé le personnel entre les Egyptiens et les non-Egyptiens en plaidant seulement pour le staff local ». Adel, quant à elle, avait obtenu deux promotions en l’espace de cinq mois (entre avril et août 2022) par Véron Mosengo-Omba.
Si d’autres conflits d’intérêts et soucis sont confirmés par ce second dossier – notamment vis-à-vis des fonds FIFA Forward -, la CAF ne s’est aventurée à aucun commentaire et dit attendre le rapport demandé par son président, Patrice Motsepe.