Quelques jours seulement après la fin de la CAN, le calme est retombé dans les différentes villes du Cameroun. Pour beaucoup, ce retour soudain à la normale n'est pas sans conséquence.
De notre envoyé spécial au Cameroun
Mervin C. est gérant d'un réceptif hôtelier qui a accueilli pas moins de six nationalités à l'occasion de la CAN 2021, remportée par les Lions du Sénégal. A peine les lampions se sont éteints au Stade Olembé de Yaoundé que Mervin a débarrassé le hall de l'hôtel de tous les drapeaux qui y trônent depuis le 9 janvier dernier. Et il avait une certaine paresse à le faire. Comme s'il avait été épuisé par le train-train quotidien de la Coupe d'Afrique des Nations. «C'est fini, on revient à la vie normale», a-t-il lancé ce matin du 7 janvier, au moment où les clients s'apprêtent pour le petit-déjeuner.
Le temps du repos arrive. Mais il est évidemment moins abondant que le temps du travail. «On revient à la normale. Ça ne nous arrange pas financièrement mais on va se reposer un peu. Ça vous arrange vous les clients puisque les chambres passent de 45000 FCFA à 30000 FCFA», détaille Mervin, dans un accent camerounais que nous avons fini par adorer et adopter !
De quoi faire bondir au plafond des journalistes et touristes heureux à l'idée de prolonger de quelques jours le séjour pour mieux se reposer. Quid des autres secteurs qui ont profité de cette CAN camerounaise pour se refaire une santé financière ou un meilleur visage auprès des populations ?
Carine E. est gérante d'une agence de voyage dans le quartier de Bali, à Douala. Nous l'avons trouvé en train de faire les comptes ce mercredi 8 février. Elle a la mine des mauvais jours. «C'est la première fois depuis début janvier que je n'ai pas reçu un appel pour une réservation de billet», assure-t-elle. «Actuellement, je ne reçois que des clients qui veulent changer leur date de départ chez eux...Je sens que les affaires vont en prendre un coup. Pendant un mois nous dépassions le million par jour car à chaque étape de la CAN, il y a des clients qui nous sollicitaient. Je travaille avec la banque d'à côté, les dépôts n'y manquaient pas. Mais aujourd'hui, c'est sûr, ils n'auront rien», nous avoue-t-elle, presque peinée.
A côté d'elle, ce que vivent les populations depuis quelques jours ressemble à un calvaire sans fin. «Depuis la fin de la CAN, les coupures d'eau et d'électricité sont intempestives. Eneo et Camwater sont retombés dans leurs travers. J'ai fait une journée sans me laver», témoigne une jeune dame.
Elle n'est pas seule dans ce cas. Junie Batoum gère un restaurant chic aux alentours du Livs, la boite de nuit où il y a eu un incendie en pleine CAN, au quartier Bastos de Yaoundé. Elle est irritée par la situation. «Je regrette déjà la Coupe d'Afrique. Quand les étrangers étaient là, on était tranquille. Pour ne pas montrer une mauvaise image du pays, tout était OK. Comment on peut faire des efforts pour une partie et refuser de les faire pour une autre partie ? On est Camerounais. C'est quand même pour nous et tout le temps que l'Etat doit travailler. Il n y a déjà plus de clients et le peu qui vient doit subir tout ça. Même avec le plat à 1000 FCFA ou 2000 FCFA au lieu de 4 à 5 mille en pleine compétition, c'est difficile de rentabiliser», peste-t-elle.
Autre lieu, autre constat, dans le quartier de Deido à Douala. «Ici, il y a toujours eu des coupures de courant. Cela n'a rien à voir avec la CAN. Pourtant, c'est l'une des places les plus prisées de Douala pour manger du bon poisson. C'est dommage», témoigne Lazaro Onana, serveur.
Pour avoir l'esprit net une bonne fois pour toute, nous sommes allés à Camwater, la Société qui distribue l'eau et située à Bonapriso. Malheureusement, nous avons été éconduits par le vigile qui a dit que nous devions déposer un courrier au préalable. Même chose à Eneo, l'entreprise qui gère l'énergie électrique. On nous a même demandé l'ordre de mission qui nous permettrait d'interroger ces différents responsables, à l'entrée. Et si possible, le questionnaire. Nous avons vite compris que la mission était impossible...
Sanh SEVERIN