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Drame de N’Zérékoré : une tragédie révélatrice des failles structurelles du sport guinéen

Lors de la finale du tournoi de la Refondation, organisé en hommage au président Mamadi Doumbouya, des heurts et mouvements de foule meurtriers ont causé la mort de dizaines, voire de centaines de supporters, et blessé de nombreux autres. Un drame survenu à N’Zérékoré, qui met un pays et son gouvernement face de plusieurs de ses failles.

Une foule immense s'était amassée au stade de N’Zérékoré.

Les images ont fait le tour des médias et des chaînes d'informations mondiales, signe de l'ampleur de la tragédie qui s'est produite ce dimanche 1er décembre. Une tragédie inimaginable a frappé la ville de N’Zérékoré, en Guinée. Ce qui devait être une célébration du sport s’est transformé en cauchemar, lorsque des échauffourées suivies de mouvements de foule ont causé la mort de dizaines, voire de centaines de personnes, lors de la finale du tournoi de la Refondation, organisé en hommage au président Mamadi Doumbouya.

Un stade vétuste, une foule incontrôlable

La finale opposait les équipes locales de N’Zérékoré et de Labé au Stade du 3 avril, un lieu vétuste dont la rénovation, entamée il y a plus d’une décennie, est restée inachevée. Prévu pour accueillir environ 3 000 spectateurs, le stade était rempli bien au-delà de sa capacité, selon les témoins et les images postées par les spectateurs présents sur place. La tension est montée lorsque l’arbitre a accordé un penalty controversé à l’équipe locale à quelques minutes de la fin du match. Le début d'un déferlement de violence qui va aboutir à un drame.

Lire sur le sujet : Guinée : la finale du tournoi de la Refondation vire au drame

Mamadou Adama Diallo, directeur de Radio Zaly, qui animait le match, se souvient de l’instant où tout a basculé. « Il y a eu des jets de pierre depuis les gradins, les policiers ont répliqué avec des gaz lacrymogènes. À la sortie, c’était le chaos : des femmes, des enfants, tout le monde s’écroulait. Beaucoup ont rendu l’âme sur place ou en route vers l’hôpital », a-t-il confié sur les ondes de RFI.

Un bilan humain effroyable

Dès le lendemain, le gouvernement a annoncé 56 morts au cours de ces évènements tragiques, mais des sources locales et hospitalières rapportent à Sport News Africa un nombre bien plus élevé, qui pourrait atteindre près de 200 victimes. Les morgues, débordées, envisageraient même l’ouverture d’une fosse commune pour faire face à l’afflux de corps. Une idée qui, si elle est mise en application, pourrait enflammer une situation déjà explosive avec de nombreuses familles endeuillées et en colère. Certaines famille ont perdu plusieurs proches, très jeunes pour la plupart, de nombreux mineurs s'étant massé au stade.

Parmi les victimes, Julien Soropogui, 12 ans, est pleuré par sa mère, venue récupérer son corps à la morgue. « Mon fils était parti voir la finale avec ses amis. Quand on m’a appelée pour m’informer qu’il était mort, je n’y croyais pas. Maintenant, je le ramène au village pour son dernier repos », témoigne-t-elle, les larmes aux yeux à Guinéenews.com.

Dans le quartier Kwitèyapoulou, Abdouraham Barry, conducteur de taxi-moto, raconte avoir retrouvé sa femme parmi les victimes à la morgue. « J’ai cherché partout. Quand je suis arrivé à l’hôpital, j’ai vu son corps par la fenêtre. Je ne sais pas comment je vais continuer. C’est une douleur que je n’ai jamais connue. »

Mariam Barry, une jeune ménagère enceinte de cinq mois, fait également partie des victimes. Son mari, encore sous le choc, confie : « Elle m’avait dit qu’elle allait voir le match. Je n’imaginais pas que je ne la reverrais plus vivante. »

Des défaillances organisationnelles accablantes

Plusieurs témoignages mettent en lumière des failles graves dans l’organisation de l’événement. Une foule bien supérieure à la capacité du stade, une porte principale fermée jusqu’à ce qu’elle cède sous la pression, et une absence criante de mesures de sécurité.

Sidy Yansané, journaliste pour le service Afrique de RFI, rapporte également l’intervention controversée du préfet et du gouverneur, qui seraient intervenus auprès de l’arbitre. Ces actions auraient enflammé la tension déjà palpable.

Souleymane Souza Konaté, président de la Commission communication de l’Alliance nationale pour la démocratie et l’alternance (Anad), critique vertement les conditions dans lesquelles la finale s’est déroulée : « C’était irresponsable. Ce tournoi n’aurait jamais dû se tenir dans un stade si vétuste et sans préparation adéquate. Cette tragédie était évitable. »

Une gestion de crise critiquée

Face à la portée du drame, le Premier ministre Bah Oury, accompagné du général Amara Camara, s’est rendu brièvement sur place pour annoncer trois jours de deuil national et promettre une enquête. « N’Zérékoré, c’est toute la Guinée qui est en deuil. Nous devons renforcer notre résilience face à cette tragédie », a déclaré Bah Oury, avant de quitter la ville après une visite à l’hôpital et des rencontres avec les autorités locales.

Cependant, cette visite éclair a suscité des critiques. Les officiels présents au stade ont été exfiltrés en urgence lors du drame, laissant des milliers de supporters livrés à eux-mêmes.

Un reflet des lacunes structurelles de la Guinée

Ce drame survenu à N’Zérékoré révèle des failles profondes dans le sport guinéen. Prévue pour abriter la CAN 2023, la Guinée a finalement été remplacée par le Maroc après s'être vu retirer l'organisation, faute d’infrastructures adaptées et construites dans les délais. Cet événement tragique met en lumière le retard persistant du pays en matière d’équipements sportifs et de normes de sécurité.

Des familles endeuillées appellent à des réformes immédiates. Pour Mamady Sanoh, père de Moussa, l’un des jeunes décédés : « Nous ne voulons pas seulement des promesses. Nous voulons que ce genre de catastrophe ne se reproduise plus jamais. »

Cette funeste tragédie survenue à N’Zérékoré doit servir de tournant pour la Guinée. Moderniser les infrastructures, respecter les normes de sécurité et planifier efficacement les événements sont des impératifs pour garantir que le sport reste une source d’unité et non de tragédie. En attendant, la Guinée pleure ses morts, et les familles des victimes tentent de trouver un semblant de réconfort dans leurs prières et leurs souvenirs.

Malick BAMBA

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